Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/83

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symbole des devoirs ecclésiastiques, simplement pour jouir des immunités et des libertés que conférait ce caractère. Le long monopole des belles-lettres, que personne ne songeait à leur contester, une influence obtenue par une union peu naturelle entre le pouvoir séculier et religieux, et la condition dépendante de l’esprit du peuple, conséquence naturelle des deux premiers avantages, engageaient tous ceux qui aspiraient à une prééminence morale à choisir ce parti, parce qu’il était le plus battu des deux chemins qui conduisaient à ce pouvoir. Ce n’est pas dans le christianisme, tel qu’il existait du temps de Luther, que nous devons seulement chercher un exemple des conséquences fâcheuses de l’autorité temporelle et spirituelle mêlées aux institutions humaines ; chrétiens ou mahométans, catholiques ou protestants, commettent le mal, parce qu’aucun d’eux ne résiste à la tentation n’éprouve le fort d’opprimer le faible, et le puissant d’abuser de son pouvoir. Contre ce malheur, il ne semble y avoir d’autre sécurité qu’une responsabilité certaine et active. Aussi longtemps qu’une moralité sévère, exigée de ses ministres par la foi chrétienne, ne sera point corrompue par un mélange grossier d’autorité temporelle et d’avantages mondains, on pourra croire que l’autel, du moins, échappera aux souillures ; mais aussitôt que ces ennemis perfides seront admis dans le sanctuaire, les passions, éveillées par la cupidité, fondront à l’envi dans le temple en se couvrant du masque de la foi, afin de participer à ses récompenses.

Quelque pur que puisse être un système social ou une religion, dans le commencement de son établissement, la possession d’un pouvoir incontesté mène toujours à des excès funestes à la justice et à la vérité. C’est une conséquence de l’exercice indépendant de la volonté humaine qui semble inséparable de l’humaine fragilité. Nous arriverons graduellement à substituer l’inclination et l’intérêt au droit, jusqu’à ce que les fondements moraux des institutions soient sapés par une coupable tolérance, et que ce qui fut regardé d’abord avec l’aversion que le mal excite dans un cœur innocent, devienne non seulement familier, mais soit justifié par la convenance et l’habitude. C’est le symptôme le plus certain de la décadence des principes nécessaires pour maintenir même notre système imparfait de vertu, que de voir plaider la nécessité d’une action pour s’écarter du chemin que cette vertu nous trace. C’est appeler l’adresse à l’aide des passions, alliance qui ne manque