Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/99

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son habitude, il la guida de manière à produire une signature lisible et valable. Lorsque cette tâche fut remplie, et que la signature eut été examinée, le comte d’Hartenbourg, jeta un regard soupçonneux d’abord sur le papier qu’il tenait en main, puis sur le visage impassible de l’abbé ; comme s’il se repentait à demi de ce qu’il venait de faire. — Regardez, Boniface, dit-il en levant sa main ; s’il y a quelque nullité, ou quelques doutes dans ce parchemin, mon épée va le couper en deux.

— Gagnez-le d’abord, comte de Leiningen. Ces contrats sont d’une égale valeur, et celui qui voudra se les approprier doit d’abord gagner le pari. Nous sommes de pauvres enfants de saint Benoît, et peu dignes d’être nommés avec de belliqueux barons et des chevaliers de Saint-Jean, mais nous avons une humble confiance dans notre patron.

— Par saint Benoit, si vous l’emportez, cela pourra passer pour un miracle. Qu’on enlève ces coupes d’agate et de corne, et qu’on en apporte de verre, afin que nous puissions agir avec loyauté à l’égard les uns des autres. Rassemblez vos esprits, moines. Sur la parole d’un chevalier ! votre latin vous rendra peu de service dans cette épreuve.

— Nous mettons notre confiance en notre patron, répondit le père Siegfried qui avait déjà fait assez d’honneur au banquet pour donner raison de croire qu’il ne pourrait prêter un bien ferme appui à son supérieur. Il n’a jamais abandonné ses enfants lorsqu’ils se sont engagés dans une bonne cause.

— Vous présentez d’adroites raisons, mes frères, dit le chevalier de Saint-Jean, et je suis persuadé que vous trouveriez de bonnes excuses si vous aviez rendu service au diable lui-même.

— Nous souffrons pour l’Église, répondit l’abbé après avoir avalé une rasade pour répondre à un signal de son hôte. Nous jugeons recommandable de combattre avec la chair, afin que nos autels fleurissent.

Les deux parchemins avaient été placés sur un vase d’argent, d’une forme élevée, et curieusement ciselé, contenant des cordiaux, et qui occupait le centre de la table. Des coupes plus commodes ayant été apportées, les combattants furent sommés d’avaler rasade après rasade, à des signaux du comte Emich, qui, comme un véritable chevalier, examinait si chacun remplissait loyalement son devoir. Mais comme la lutte avait lieu entre hommes d’une