Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 13, 1839.djvu/103

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venaient des montagnes étaient déjà passées, et une brise du nord, forte, mais égale, leur succédait. Le chagrin de Maso perdit également de sa vigueur pour prendre un caractère plus calme.

Pendant toute cette scène d’horreur, la foule des passagers était restée couchée sur le pont, partie par stupeur, partie par crainte superstitieuse, et beaucoup aussi par l’impossibilité de bouger sans courir le risque d’être renversés de la barque dans le lac mais, à mesure que la force du vent diminua et que le mouvement de la barque devint plus régulier, tous ces hommes reprirent leurs sens et, les uns après les autres, ils se retrouvèrent bientôt sur leurs pieds. Vers ce moment, Adelheid entendit la voix de son père la remerciant de ses soins et consolant sa douleur. Le vent du nord chassa au loin les nuages, et les étoiles brillèrent au-dessus du Léman irrité, apportant avec elles la promesse d’un secours divin, comme la colonne de feu envoyée aux Israélites dans leur passage de la mer Rouge. Une telle preuve d’un calme prochain ranima la confiance. Tous ceux qui étaient dans la barque, les passagers, l’équipage, reprirent courage à ces signes bienveillants, tandis qu’Adelheid pleurait de reconnaissance et de joie sur les cheveux blancs de son père.

Maso avait alors complètement obtenu le commandement du Winkelried, autant par la nécessité que par l’adresse et le courage qu’il avait manifestés pendant cet extrême danger. Aussitôt qu’il eut réussi à calmer sa douleur, il appela les matelots et leur donna ses ordres pour les nouvelles mesures qui étaient devenues nécessaires.

Tous ceux qui ont été soumis à leur influence savent que rien n’est incertain comme les vents. Leur inconstance a passé en proverbe. Mais cette inconstance aussi bien que leur pouvoir, depuis la brise légère jusqu’au tornade destructeur, sont attribuée à des causes suffisamment claires, bien que nos calculs ne puissent pas les prévoir. La tempête qui venait d’avoir lieu, pouvait être attribuée à ce simple fait : une colonne d’air des montagnes condensée et refroidie avait pressé les substances brûlantes du lac, et ce dernier, après une longue résistance, avait cédé à la cataracte supérieure, comme dans tous les efforts extraordinaires, soit physiques soit moraux, la réaction semble être une conséquence d’une force excessive ; les courants d’air, repoussés au--