Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 13, 1839.djvu/137

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tourelles à ses angles. À l’abri du feu de l’extérieur, il y avait des échelles pour monter d’étage en étage, et souvent les lits étaient renfermés dans la profondeur d’une fenêtre, ou dans des alcôves pratiquées dans l’épaisseur des murailles. Lorsque la fortune du châtelain le permettait, ou que sa sûreté l’exigeait, on construisait, autour de la base, des communs assez considérables pour enclore une cour, et l’on créa ainsi toutes ces masses irrégulières qu’on voit maintenant en si grande quantité sur le sommet des Alpes.

Selon l’usage, la salle des Chevaliers, dans le château de Blonay, était la plus grande et la mieux ornée. Depuis longtemps elle ne ressemblait plus à une espèce de prison formée dans le roc lui-même, et avec tant d’art, qu’il était difficile de deviner où la nature cessait, et où l’art commençait : mais, depuis un siècle elle avait été transférée dans une partie plus moderne de l’édifice à l’angle sud-est. Cet appartement était carré, spacieux, simple ; telle est la mode du pays. Il était éclairé par des fenêtres qui donnaient, d’un côté sur le Valais, et de l’autre sur les charmants rivages du lac de Genève ; cette vue magnifique était parsemée de hameaux, de villages, de villes, de châteaux, de collines, et se terminait par les sombres montagnes du Jura. Cette dernière fenêtre était ornée d’un balcon en fer à une hauteur prodigieuse au-dessus du sol, et c’était dans ce nid d’aigle qu’Adelheid avait été s’asseoir, lorsque, après avoir quitté son père, elle était montée dans cet appartement, commun à tous les hôtes du château.

Nous avons déjà parlé des avantages physiques et des qualités morales de la fille du baron de Willading ; mais nous croyons qu’il est maintenant nécessaire de faire faire au lecteur une connaissance plus ample avec celle qui est destinée à jouer un des rôles les plus importants de cette histoire. Nous avons dit qu’elle était charmante, mais sa beauté était due plutôt à une expression remplie d’une grâce féminine, qu’à des lignes régulières et symétriques. Ses traits, sans être parfaits, étaient combinés avec une harmonie que son œil bleu et doux, sa bouche souriante, faisaient ressortir encore ; ou y lisait son âme pure et toutes ses pensées. Cependant une modeste réserve dominait dans toutes ses paroles et dans toutes ses actions, et c’était au moment où son esprit s’y livrait le plus, qu’on en ressentait l’influence. Peut-être une intelligence et une instruction supérieures à celles que les femmes