Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/175

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Les montagnes avaient alors entièrement disparu au sud ; mais la mer formait, aussi loin que l’œil pouvait atteindre, un vaste champ de glace. Noé s’en approcha sans crainte ; car la mer s’était apaisée depuis que nous avions pénétré dans la première ouverture, et le vent n’avait plus la force de soulever une seule vague. Quand nous fûmes environ à un mille de ce champ de glace, qui semblait interminable, le navire fut de nouveau exposé au vent, et vogua à pleines voiles.

Depuis le moment où le bâtiment avait quitté le chantier, il était toujours resté dans un coin une assez grande quantité de pièces de bois d’une forme si singulière, qu’elles avaient souvent fourni à la conversation entre les marins et moi, qui n’avais pu obtenir d’aucun d’eux le moindre renseignement sur la destination de ces objets. Elles étaient d’une longueur ordinaire, de quinze pieds tout au plus, et d’excellent chêne d’Angleterre. Il y en avait deux ou trois paires pareilles, car elles étaient rangées par paires : la forme de chaque paire ressemblait d’un côté aux différentes parties du fond d’un navire, si ce n’est qu’elle était presque partout concave, tandis que le fond d’un vaisseau est presque entièrement convexe. Chaque paire était assujettie à l’une de ses extrémités par une chaîne de fer courte et massive, d’environ deux pieds de long ; et à l’extrémité opposée, une forte cheville ville à œillet traversait chacune des pièces auxquelles elle était attachée. Quand le Walrus s’arrêta, nous apprîmes pour la première fois le but de ces préparatifs extraordinaires. Deux pièces de bois pareilles, d’une solidité et d’une force remarquables, furent descendues sur l’arrière, et on les plongea sous la quille ; leurs extrémités supérieures étaient assujetties au moyen de lanières tournées autour des chevilles. Les lanières furent alors descendues jusqu’à la cale du vaisseau, où, à l’aide de cordages, les pièces de bois furent halées de manière à ce que la chaîne serrât de près la quille, et à ce que les pièces elles-mêmes touchassent les flancs du vaisseau de chaque côté. Comme on avait pris beaucoup coup de précautions, soit en boisant des marques sur le vaisseau ; soit en confectionnant les défenses, tout s’adapta parfaitement. Il n’y eut pas moins de dix de ces pièces de bois attachées ainsi sous le navire, et il y en eut encore autant de disposées de l’avant à l’arrière, suivant la forme de la cale. Ces pièces, ainsi disposées le long de la partie inférieure du vaisseau, étaient garnies par-dessus et par-dessous d’un certain nombre de petites côtes, et les extré-