Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/54

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vons savoir quel était son bon plaisir relativement à ses restes vénérables ; mais je suis très-résolu à faire exécuter ses derniers ordres à ce sujet, quand même il faudrait faire exhumer son corps.

Je suis d’humeur pacifique, et même un peu crédule, mais la nature ne m’a pas refusé une certaine vigueur d’esprit. Je ne vis pas, du premier coup d’œil, ce que sir Joseph Job, ou toute autre personne, pouvait avoir de commun avec le testament de mon père, et j’eus soin de l’exprimer en termes fort intelligibles.

— Comme fils unique, et même seul parent connu du défunt, répondis-je, je ne vois pas trop, Messieurs, comment cet objet peut intéresser si vivement tant d’étrangers.

— Excellente réplique, et faite fort à propos, dit sir Joseph en souriant ; mais vous devez savoir, jeune homme, que s’il y a des héritiers, il y a aussi des exécuteurs testamentaires.

Je ne l’ignorais pas, et j’avais aussi entendu dire que les derniers avaient souvent la meilleure part de la succession.

— Avez-vous lieu de supposer, sir Joseph, que mon père vous ait choisi pour remplir cette fonction ?

— C’est ce que nous saurons avec le temps, jeune homme. On sait que votre père est mort riche, très-riche, — non qu’il ait laissé, à un demi-million près, autant qu’on le suppose ; mais il est de fait qu’il possédait ce que j’appellerai une fortune confortable. Il ne serait pas raisonnable de supposer qu’un homme ayant le bon sens et le prudence du défunt, ait voulu que cette fortune passât à son héritier légal, — surtout quand cet héritier est un jeune homme dans sa vingt-troisième année, n’entendant rien aux affaires, peu pourvu d’expérience, et ayant les penchants ordinaires des jeunes gens de son âge dans ce siècle de folies et d’extravagances, — sans prendre des mesures et des précautions pour que ces biens, qu’il a eu tant de peine à amasser, restassent pendant quelque temps sous l’administration de gens connaissant comme lui toute la valeur de l’argent.

— Impossible ! — Plus qu’impossible ! — s’écrièrent plusieurs voix. Et tous de secouer la tête.

— Et quand feu M. Goldencalf était intimement lié avec les hommes les mieux connus à la Bourse, et notamment avec sir Joseph Job ! ajouta un autre.

Sir Joseph fit un geste d’approbation, sourit, se frotta le menton, et attendit ma réponse.