Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/63

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je ne leur reconnais d’autre autorité que celle qui se rattache immédiatement au service particulier dont ils sont chargés. Si nous permet tous à un homme d’entrer dans notre maison pour y chercher des voleurs, il ne s’ensuit pas, de ce qu’il y est admis, qu’il ait le droit d’y exercer d’autres fonctions. Je crois que la corvette qui nous donne la chasse doit, comme croiseur du gouvernement, être admise à visiter ce bâtiment ; mais que n’y trouvant rien qui soit contraire au droit des gens, elle n’aura le droit ni de le détenir, ni de le molester de quelque manière que ce soit. Le droit que j’accorde doit même être exercé de bonne foi et sans aucun abus vexatoire.

— Mais sûrement vous devez penser qu’en emmenant un homme qui se soustrait à la justice, nous nous sommes mis dans notre tort, et que nous ne pouvons nous opposer à ce qu’il soit reconduit dans le pays dont il s’est échappé, quelque compassion que nous puissions avoir pour le cas particulier dont il s’agit.

— Je doute fort que le capitaine Truck soit disposé à raisonner d’une manière si vague. D’abord il pourra dire que son bâtiment avait reçu la permission régulière de sortir du port et de mettre à la voile ; qu’en permettant à un officier de visiter son bâtiment tandis qu’il était dans les eaux britanniques, il a fait tout ce qu’on pouvait exiger de lui, la loi ne l’obligeant pas à jouer le rôle de dénonciateur ; que le mandat dont l’officier était porteur l’autorisait à arrêter Davis, mais non à retarder le départ du Montauk ; qu’une fois hors des eaux britanniques il n’était plus soumis qu’aux lois américaines, et que l’officier de justice anglais était, sur son bord, un intrus dont il avait le droit de se débarrasser ; enfin, que le mandat qui donnait à cet officier tous ses droits, devenait nul et de nul effet du moment qu’il se trouvait hors de la juridiction sous laquelle il avait été décerné.

— Je crois que vous trouverez le capitaine de la corvette peu disposé à admettre cette doctrine.

— Cela n’est pas impossible. Les hommes préfèrent souvent recourir à des abus, plutôt que d’être contrariés dans leurs désirs. Mais le capitaine de cette corvette pourrait tout aussi bien aller à bord d’un vaisseau de guerre et prétendre avoir le droit de le commander en vertu de la commission qui lui donne le commandement du sien, que prétendre avoir des raisons légales pour faire ce que vous semblez prédire.

— Je suis bien charmée d’apprendre que ce pauvre homme ne peut à présent être séparé de sa femme ! s’écria Ève.