Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/95

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voitures, quoique les distances ne fussent pas très-grandes, et l’on partit vers midi.

Grace avait cessé d’espérer que sa cousine jetterait un regard d’admiration sur aucun des lions de New-York ; Ève ayant jugé à propos de lui dire que, du moins par comparaison, on pouvait dire peu de chose à l’éloge de ces merveilles provinciales. Mademoiselle Viefville elle-même, à présent que la nouveauté était passée, avait pris une manière tranquille et naturelle de parler de tout ce qu’elle voyait ; et Grace, qui ne manquait pas de pénétration, remarqua bientôt que, lorsqu’elle faisait quelque comparaison avec des objets à peu près semblables en Europe, ce n’était jamais qu’avec ceux qui pouvaient exister dans quelque ville de province. Il y avait donc une convention tacite de ne plus parler de pareils sujets ; ou, si l’on en parlait, c’était par hasard, et quand ils se rattachaient inséparablement au fil de la conversation.

En arrivant dans Wall-Street, les voitures s’arrêtèrent, et les hommes descendirent ; mais la rigueur du froid retint les dames dans la leur, et Grace chercha à tout expliquer de son mieux à ses compagnes.

Pourquoi tout ce monde court-il ainsi ? demanda mademoiselle Viefville.

— Pour des dollars, à ce que je m’imagine. Me trompé-je, Grace ?

— Je ne le crois pas, répondit miss Van Courtlandt en souriant, quoique je ne connaisse guère mieux que vous cette partie de la ville.

Le bâtiment dans lequel tout le monde veut entrer est-il donc plein de dollars ? Quelle foule sur les marches !

— C’est la Bourse, Mademoiselle, et elle devrait en être bien remplie, d’après la manière dont vivent quelques-uns de ceux qui la fréquentent. Ah ! voilà mon cousin John et sir George que je vois se mêler dans la foule.

Nous laisserons les dames quelques minutes pour suivre leurs amis dans la Bourse.

— Je vais vous faire voir, sir George, dit John Effingham, ce qui est particulier à ce pays, et ce qui, à l’aide de quelques améliorations faciles, vaudrait réellement la peine de traverser l’Océan pour le voir. À Paris, vous avez vu le spectacle désagréable de femmes jouant publiquement dans les fonds