Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/197

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peu vif. — On reconnaît la votre naissance en Amérique et vos habitudes américaines. Un soldat de Sa Majesté ne doit compter pour ses vivres que sur le commissariat, et je désire qu’aucune partie de mon régiment ne donne l’exemple du contraire.

— Vous n’avez qu’à parler pour être obéi, major Duncan ; et pourtant si j’osais…

— Parlez librement, sergent, vous parlez à un ami.

— C’était seulement pour vous dire que je vois que les soldats écossais aiment la venaison autant que le lard, depuis qu’elle devient plus rare.

— Cela peut être vrai ; mais ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas n’ont rien de commun avec un système ; une armée ne doit compter que sur ses commissaires. Les irrégularités des troupes provinciales ont déjà nui trop souvent au service du roi, pour qu’il soit permis d’y fermer les yeux plus long-temps.

— Le général Braddock, Votre Honneur, aurait pu prendre une leçon du colonel Washington.

— Ne me citez pas toujours votre Washington. Vous autres provinciaux, vous vous soutenez les uns les autres comme si vous formiez une confédération.

— Je pense que Sa Majesté n’a pas de sujets plus loyaux que les Américains, major.

— À cet égard, Dunham, je crois que vous avez raison, et je me suis peut-être exprimé avec un peu trop de chaleur. Au surplus je ne vous regarde pas comme un soldat provincial, sergent ; car, quoique vous soyez né en Amérique, jamais meilleur soldat n’a appuyé un mousquet sur son épaule.

— Et le colonel Washington, Votre Honneur ?

— Eh bien ! et le colonel Washington aussi peut être un soldat utile. C’est le prodige américain ; et je suppose que je dois croire tout ce que vous me dites de lui. — Vous n’avez aucun doute sur l’habileté de Jasper Eau-douce ?

— Il a fait ses preuves, major, et il s’est montré en état de faire tout ce qu’on peut exiger de lui.

— Eau-douce est un nom français. — Il a passé une grande partie de son enfance dans les colonies françaises. — N’a-t-il pas du sang français dans les veines, sergent ?

— Pas une goutte, Votre Honneur. Il est fils d’un de mes anciens camarades, et sa mère sortait d’une honnête et loyale famille de cette province même.