CHAPITRE II.
andis que don Juan, roi d’Aragon, avait recours à de pareils
moyens pour mettre son fils en état d’échapper aux vigilants et
vindicatifs émissaires du roi de Castille, il y avait à Valladolid
des cœurs inquiets qui en attendaient le résultat avec le doute et
l’impatience qui accompagnent toujours l’exécution des entreprises
hasardeuses. Parmi tous ceux qui prenaient cet intérêt
profond aux mouvements de Ferdinand d’Aragon et de ses compagnons,
il s’en trouvait quelques-uns qu’il devient nécessaire de
faire connaître au lecteur.
Quoique Valladolid n’eût pas encore atteint cette magnificence à laquelle elle arriva dans la suite comme capitale du royaume de Charles V, c’était une ville fort ancienne, où régnait ce qu’on pouvait appeler pour ce siècle du luxe et de la magnificence. Elle avait ses palais, comme ses demeures inférieures. Le plus beau de ces premiers était la résidence de Juan de Vivéro, seigneur distingué du royaume, et c’est là qu’il faut nous transporter en imagination. Nous y sommes attendus par une compagnie plus agréable que celle que nous venons de quitter, et elle attendait elle-même avec beaucoup d’inquiétude l’arrivée d’un messager qui devait apporter des nouvelles de Duéñas. L’appartement particulier qu’il serait nécessaire de se figurer, réunissait à la splendeur grossière de cette époque toutes les aises qu’une femme manque rarement de donner à la partie d’une maison qui lui est particulièrement destinée. En 1469, l’Espagne approchait rapidement de la fin de cette grande lutte qui avait déjà duré pendant sept siècles, et dans laquelle les chrétiens et les musulmans s’étaient disputé la possession de la Péninsule. Les derniers