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OU LE TUEUR DE DAIMS.

trats des établissements, et pour épargner au coquin lui-même les frais du procès ?

— Je ne suis point trappeur, Hurry, répondit le jeune homme avec fierté ; je vis de ma carabine, et avec cette arme je ne tournerai le dos à personne de mon âge entre l’Hudson et le Saint-Laurent. Je n’offre jamais une peau qui n’ait un trou à la tête entre ceux que la nature y a faits pour voir et pour respirer.

— Cela est fort bon, en parlant d’animaux, mais cela fait une pauvre figure à côté de chevelures enlevées et d’embuscades. Se mettre en embuscade pour tuer un Indien, c’est agir d’après les propres principes de celui-ci, et alors nous avons ce que vous appelez une guerre légale. Plus tôt vous purgerez votre conscience de cette honte, mieux vous en dormirez, quand cela ne viendrait que de savoir que vous avez un ennemi de moins rôdant dans les bois. Je ne fréquenterai pas longtemps votre société, ami Natty, si votre carabine ne vise pas plus haut que sur des quadrupèdes.

— Notre voyage est presque fini, à ce que vous dites, maître March, et nous pouvons nous séparer ce soir si vous le jugez à propos. J’ai un ami qui m’attend, et il ne regardera pas comme un déshonneur la compagnie d’un homme qui n’a pas encore tué un de ses semblables.

— Je voudrais savoir ce qui a porté ce Delaware à venir se tapir dans cette partie du pays, et de si bonne heure dans la saison, murmura Hurry de manière à montrer de la méfiance, et à faire voir en même temps qu’il s’inquiétait fort peu qu’on s’en aperçût ; où dites-vous que le jeune chef vous a donné rendez-vous ?

— Près d’un petit rocher rond à l’extrémité du lac, où l’on m’assure que les tribus indiennes ont coutume de se rendre pour conclure leurs traités et enterrer leurs haches. J’ai souvent entendu les Delawares parler de ce rocher, quoique je ne connaisse encore ni le rocher ni le lac. Cette partie du pays est réclamée par les Mingos et les Delawares. C’est une sorte de territoire commun pour la pêche et la chasse en temps de paix ; mais Dieu seul sait ce qu’il pourra devenir en temps de guerre.

— Un territoire commun ! s’écria Hurry avec un grand éclat de rire ; je voudrais bien savoir ce que Hutter Tom Flottant dirait à cela, lui qui réclame le lac comme lui appartenant, en vertu d’une possession de quinze ans ! Il n’est pas probable qu’il le cède sans contestation aux Mingos ou aux Delawares.

— Et que dira la colonie d’une telle querelle ? Tout ce pays doit avoir quelque propriétaire. Les désirs des colons avancent dans le