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OU LE TUEUR DE DAIMS.

ware, et Hawkeye ressemble plus à un Huron qu’à une femme.

— Je suppose que vous savez ce que vous voulez dire, Mingo : si vous ne le savez pas, je ne doute point que Satan ne le sache. Mais si vous désirez tirer quelque chose de moi, parlez plus clairement, car on ne peut faire un marché les yeux fermés et la langue liée.

— Bon ! Hawkeye n’a pas la langue fourchue, et il aime à dire ce qu’il pense. Eh bien ! Hawkeye est une connaissance du Rat-Musqué, — c’était le nom que les Indiens donnaient à Hutter ; — il a vécu dans son wigwam, mais il n’est pas son ami. Il n’a pas besoin de chevelures comme un pauvre Indien, et il a tout le courage d’une Face-Pâle. Le Rat-Musqué n’est ni blanc ni rouge, ni chair ni poisson ; c’est un serpent d’eau, qui se tient tantôt sur le lac, tantôt sur la terre, et à qui il faut des chevelures. Hawkeye peut retourner chez lui, et lui dire qu’il a eu plus d’esprit que les Hurons, et qu’il leur a échappé ; et quand les yeux du Rat-Musqué seront dans un brouillard, et qu’il ne pourra voir de sa maison jusque dans les bois, Hawkeye peut ouvrir la porte aux Hurons. Et comment se partagera le butin ? Hawkeye, prendra ce qu’il lui plaira, et les Hurons se contenteront du reste. Quant aux chevelures, elles peuvent aller au Canada, car les Faces-Pâles ne s’en soucient point.

— Eh bien, Rivenoak, car je les entends vous nommer ainsi, je sais ce que vous voulez dire à présent ; quoique vous parliez iroquois, c’est d’assez bon anglais ; et je dois dire que les Mingos sont plus diables que le diable. Oui, sans doute, il me serait assez facile d’aller dire au Rat-Musqué que je me suis tiré de vos mains, et de me faire quelque mérite de cet exploit.

— Bon ! c’est justement ce que j’attends de vous.

— Oui, oui, cela est assez clair ; il ne vous faut pas plus de paroles pour me faire comprendre ce que vous voulez. Quand je serai chez le Rat-Musqué, mangeant son pain, riant et jasant avec ses jolies filles, il faut que je lui couvre les yeux d’un brouillard si épais, qu’il ne puisse voir sa porte et encore moins la terre.

— Bon ! Hawkeye aurait dû naître Huron ! Son sang n’est qu’à demi blanc.

— C’est en quoi vous vous trompez, Huron. Oui, vous vous trompez autant que si vous preniez un loup pour un chat sauvage. J’ai le sang et le cœur blancs, quoique mes habitudes et mes goûts soient un peu rouges. Mais quand le vieux Hutter aura les yeux dans un brouillard, que ses jolies filles seront peut-être endormies,