Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 19, 1842.djvu/309

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
304
DEERSLAYER

les Iroquois comme vous l’entendrez. — Ouvrez cette fenêtre, Tom Flottant, et je vais aller à tâtons jusqu’à la porte pour l’ouvrir aussi.

Un moment de silence suivit, et l’on entendit ensuite un bruit semblable à celui que produirait la chute d’un corps pesant. Un jurement énergique, proféré par Hurry, y succéda ; et un instant après ce ne fut plus que tumulte dans l’intérieur de l’édifice. On ne pouvait se méprendre au bruit qui éclata d’une manière si soudaine et si inattendue, même pour Chingachgook ; il ressemblait aux rugissements de tigres enfermés dans la même loge et s’entre-déchirant. Une fois ou deux, le cri de guerre des Indiens fut poussé, mais il était faible et semblait étouffé ; et une autre fois une exécration révoltante partit de la bouche de Hurry. Il semblait que des corps étaient constamment jetés sur le plancher avec violence, et se relevaient au même instant pour recommencer la lutte. Chingachgook ne savait que faire. Il avait dans l’arche toutes les armes, Hutter et Hurry n’en ayant emporté aucune, mais il ne pouvait ni s’en servir, ni les passer à ceux à qui elles appartenaient. Les combattants étaient littéralement encagés, et il leur était impossible, ou de sortir du bâtiment, ou de passer ailleurs dans l’intérieur. D’une autre part, Hist gênait les mouvements du Delaware, et mettait obstacle à ce qu’il aurait voulu faire. Pour sortir d’embarras, il lui dit de prendre la pirogue qui restait, et d’aller joindre les filles de Hutter, qui s’approchaient imprudemment, afin de les avertir du danger qu’elles couraient, et de se sauver elle-même. Mais elle refusa positivement et avec fermeté de lui obéir, car en ce moment nul pouvoir humain, si ce n’est l’emploi d’une force physique supérieure, n’aurait pu la déterminer à quitter l’arche. L’urgence du moment n’admettait aucun délai, et Chingachgook, ne voyant aucune possibilité de servir ses amis, coupa son amarre, et repoussant le scow de toutes ses forces, le fit aller à environ vingt pieds de la palissade. Prenant alors les avirons, il s’éloigna encore à une courte distance au vent, si l’on peut donner le nom de vent au peu d’air qu’il faisait ; mais tous ses efforts ne purent le faire aller plus loin, et le temps ne le permettait pas. Quand il cessa de ramer, l’arche pouvait être à une cinquantaine de toises de la plate-forme. Judith et Hetty avaient découvert que quelque chose allait mal, et elles étaient stationnaires à environ deux cents toises de l’arche.

Pendant ce temps, une lutte furieuse continuait dans la maison. Dans de semblables scènes, les événements se passent avec plus de rapidité qu’on ne peut les raconter. Depuis le moment où le bruit de la première chute avait été entendu jusqu’à celui où le Dela-