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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 19, 1842.djvu/40

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DEERSLAYER

amarrée au rivage : mais il était toujours désappointé, et ils n’étaient qu’à un mille de l’extrémité méridionale du lac, ou à une distance de deux bonnes lieues du château, qui était alors caché à leurs yeux par une demi-douzaine de langues de terre, quand il cessa tout à coup de ramer, comme s’il n’eût su dans quelle direction il devait gouverner.

— Il est possible que le vieux Tom soit entré dans la rivière, dit-il après avoir regardé avec soin le long de la rive orientale, qui était à environ un mille de distance, et qu’il pouvait voir sans obstacle dans la moitié de sa longueur ; car il paraît qu’il s’est considérablement adonné depuis peu au métier de trappeur, et, sauf les obstacles du bois flottant, il peut la descendre aisément pendant un mille ou deux, mais il aura diablement à remuer les bras pour la remonter.

— Mais où est donc cette rivière, Hurry ? Je ne vois ni dans les rives du lac ni entre les arbres aucune ouverture assez large pour qu’un fleuve comme le Susquehannah puisse y passer.

— Ah ! ah ! Deerslayer, les fleuves ressemblent aux hommes, qui sont bien chétifs en arrivant dans le monde, et qui finissent par avoir de larges épaules et de grandes bouches. Vous ne voyez pas la rivière, parce qu’elle passe entre des rives hautes et escarpées, et que les pins, les chênes et les tilleuls en couvrent les eaux comme un toit couvre une maison. Si le vieux Tom n’est pas dans la crique du Rat, il faut qu’il soit entré dans la rivière ; mais nous le chercherons d’abord dans la crique.

Ils se remirent à ramer, et Hurry expliqua à son compagnon qu’il se trouvait à peu de distance une crique dont l’eau était peu profonde, formée par une longue et basse pointe ; qu’on l’avait nommée la crique du Rat, parce qu’il s’y trouvait toujours une quantité prodigieuse de rats musqués ; et qu’elle mettait l’arche si complètement à couvert, que Hutter aimait à y jeter l’ancre quand il était dans les environs.

— Comme on ne sait jamais quels visiteurs on peut avoir dans cette partie du pays, continua Hurry, c’est un grand avantage de pouvoir les voir avant qu’ils soient trop près. À présent qu’on est en guerre, cette précaution est plus que jamais nécessaire, car un Canadien ou un Mingo peut arriver chez vous avant d’y être invité. Mais Hutter a bon nez, et il sent le danger comme un chien sent un daim.

— Je pense que le château est tellement ouvert, qu’il ne pourrait manquer d’attirer les ennemis s’ils venaient à découvrir ce lac, ce