Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/120

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il n’avait échappé à ce destin que par stratagème. Excité par ces réflexions et le bruit de la marche des cavaliers, il se remit à fuir devant eux. Un fragment de mur qui avait résisté aux ravages faits par la guerre aux clôtures voisines se trouva heureusement sur son chemin. À peine franchissait-il cette barrière, qu’une vingtaine de ses ennemis arriva du côté opposé. Les chevaux dans l’obscurité refusèrent de sauter, et Birch parvint au pied d’une montagne sur le haut de laquelle il devait être à l’abri de toute crainte de la cavalerie. Le cœur du colporteur battait vivement et renaissait à l’espérance, quand il entendit encore retentir à ses oreilles la voix de Lawton qui criait à ses soldats de lui faire place. Cet ordre fut promptement exécuté, et l’intrépide capitaine courant vers le mur au grand galop plongea ses éperons dans les flancs de son coursier, qui franchit cet obstacle avec la rapidité de l’éclair et sans aucun accident. Les cris de triomphe des dragons et le bruit de la marche du cheval qui avançait n’annoncèrent que trop clairement au colporteur que son danger était devenu imminent. Il était presque épuisé de fatigue, et son destin ne semblait plus douteux.

— Arrête, ou tu es mort, s’écria le capitaine avec un ton de détermination bien prononcée.

Harvey jeta un regard craintif en arrière, et à la clarté de la lune vit à quelques pas de lui l’homme qu’il craignait le plus dans le monde s’avancer le sabre levé. La frayeur, l’épuisement, le désespoir produisirent un tel effet sur lui qu’il tomba par terre sans mouvement. Le cheval de Lawton heurta contre son corps, et renversa sous lui son cavalier.

Birch se releva avec la promptitude de la pensée et s’empara du sabre de Lawton. La vengeance est une passion qui ne semble que trop naturelle à l’homme. Peu de gens n’ont pas éprouvé le plaisir séduisant de faire retomber une injure sur la tête de celui qui en paraît l’auteur, et cependant il en est quelques-uns qui savent combien il est plus doux de rendre le bien pour le mal. Tout ce qu’avait souffert le colporteur se retraça vivement à son esprit. Le démon prévalut en lui un instant, et Birch fit brandir en l’air l’arme fatale ; mais le moment d’après il la jeta près du capitaine qui reprenait ses sens, mais qui était encore hors d’état de se défendre, et prit la fuite vers la montagne protectrice.

— Aidez le capitaine à se relever, s’écria Mason arrivant avec une douzaine de dragons, et que quelques-uns de vous mettent