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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/206

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à son prisonnier ; Birch la reçut avec un respect habituel en lui ; mais ses yeux égarés et son air de distraction firent croire au sergent que la crainte de la mort était le seul objet qui l’occupât, et il crut devoir tâcher de le rappeler à des sentiments religieux.

— S’il y a quelque chose qui vous pèse sur la conscience, voici le moment d’y songer. Si vous avez commis quelques fautes, et qu’il soit possible de les réparer, je vous promets sur la parole d’un honnête dragon de vous aider à le faire si j’en suis capable.

— Qui peut se flatter d’avoir vécu sans commettre de fautes ? dit Harvey en jetant un coup d’œil distrait sur son gardien.

— C’est la vérité. L’homme est naturellement faible ; il fait quelquefois ce qu’il voudrait ensuite n’avoir pas fait. Mais au bout du compte on n’aime pas à mourir avec une conscience trop chargée.

Harvey, pendant ce temps, avait bien examiné le local dans lequel il devait passer la nuit, et il ne vit aucun moyen de s’échapper. Mais l’espérance est le dernier sentiment qui meure dans le cœur de l’homme ; il donna alors toute son attention au sergent qui lui parlait. Fixant sur lui un regard si perçant qu’Hollister en baissa les yeux : — On m’a appris, lui répondit-il, à déposer le fardeau de mes fautes aux pieds de mon Sauveur.

— C’est assez bien, mais il faut aussi rendre justice à qui de droit si cela se peut. Il s’est passé bien des choses dans ce pays depuis la guerre ; bien des gens ont été dépouillés de ce qui leur appartenait légitimement. Moi-même j’ai quelquefois des scrupules sur ce que je me suis approprié dans des occasions où le pillage nous était permis.

— Ces mains, dit Birch en étendant ses doigts maigres avec une sorte d’orgueil, ont consacré bien des années au travail, mais elles n’ont jamais donné un instant au pillage.

— C’est encore bien, et ce doit être pour vous une grande consolation. Il y a trois péchés principaux, et celui qui a la conscience nette à cet égard peut espérer, avec la grâce du ciel, d’être un jour passé en revue avec les saints du ciel : ce sont le vol, le meurtre et la désertion.

— Grâce au ciel ! dit Birch avec fureur, je n’ai jamais ôté la vie à un de mes semblables.

— Oh ! tuer un homme en bataille rangée, ce n’est pas un péché ; ce n’est que faire son devoir, répliqua Hollister qui sur le champ de bataille était un imitateur zélé de son capitaine ; et