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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/236

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plaisir du capitaine, il commença sa chanson. Mais soit que son coursier fût excité par le son de sa voix, soit que sa monture voulût imiter le trot de celle de Lawton, il arriva qu’avant qu’il eût fini le second couplet, la voix du docteur formait des cadences qui suivaient régulièrement les mouvements de bascule de son corps.

Malgré cette circonstance peu favorable à l’harmonie, Sitgreaves n’en continua pas moins sa chanson, et il chanta sans interruption les trois couplets suivants :


« La flèche de l’Amour t’a-t-elle jamais blessée, ma chère  ? As-tu exhalé son soupir tremblant ? As-tu songé à celui qui était bien loin et qui était toujours présent à tes yeux brillants ? Alors tu sais ce que c’est que d’éprouver un mal que l’art de Galien ne peut guérir.

« Ton front s’est-il jamais couvert d’une rougeur pudique, ma chère ? As-tu jamais senti une chaleur soudaine se répandre sur tes joues blanches comme le marbre, quand Damond lisait dans ton cœur ? En ce cas, jeune insensée, tu as rougi d’éprouver un mal dont Harvey lui-même a été attaqué.

« Mais à chacun de tes maux, ma chère, à chaque douleur causée par les flèches de l’Amour, follette, à tout ce que tu peux craindre, en un mot, il existe un antidote. L’art tout-puissant de l’hymen peut guérir les blessures des jeunes amants.

« As-tu jamais… »


— Chut ! s’écria Lawton. Quel bruit entends-je sur ces rochers ?

— C’est l’écho.


« As-tu jamais… »


— Écoutez dit Lawton en faisant arrêter son cheval. À peine avait-il prononcé ce mot, qu’une pierre tomba à ses pieds, et roula près de lui sans lui faire aucun mal.

— C’est un coup de feu tiré en ami, ajouta le capitaine ; ni la balle, ni la main qui l’a fait partir ne paraissent avoir des intentions bien hostiles contre nous.

— Le coup d’une pierre ne peut guère produire qu’une contusion, dit le docteur en regardant inutilement de tous côtés pour chercher celui qui voulait les lapider ainsi. Il n’y a pas un seul être vivant dans les environs, il faut que ce soit un aérolithe.

— Un régiment tout entier se cacherait aisément derrière ces rochers, répondit le capitaine en mettant pied à terre pour ramasser la pierre. Oh ! oh ! ajouta-t-il, voici l’explication du mystère. Et en même temps prenant un papier ingénieusement atta-