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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/237

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ché au petit fragment de rocher qui venait de tomber à ses pieds si singulièrement, et l’ayant déplié, il lut les mots suivants, dont l’écriture était à peine lisible :

« Une balle de mousquet fait plus de chemin qu’une pierre, et les rochers de West-Chester cachent des choses plus dangereuses que les herbes pour les blessés. Le cheval peut être bon, mais est-il en état d’escalader un rocher ?

— Tu dis la vérité, homme étrange, s’écria Lawton. Dans un endroit comme celui-ci le courage et l’activité sont une faible ressource contre l’assassinat. Remontant à cheval, il cria à haute voix :

— Grand merci, mon ami inconnu ; je me souviendrai de votre avis, et je n’oublierai jamais que tous mes ennemis ne sont pas sans pitié.

Une main maigre s’éleva un instant au-dessus des broussailles qui couvraient les rochers, s’agita en l’air, et les deux amis ne virent ni n’entendirent plus rien.

— Voilà une aventure tout à fait extraordinaire, dit le chirurgien étonné, et le sens de ce billet est tout à fait mystérieux.

— Bon ! dit le capitaine en mettant le billet dans sa poche, c’est quelque mauvais plaisant qui s’imagine effrayer ainsi deux officiers des dragons de Virginie. Mais à propos, monsieur le docteur Archibald Sitgreaves, permettez-moi de vous dire que vous aviez formé le projet de disséquer un bien honnête garçon.

— Quoi ! le colporteur ! un espion au service de l’ennemi ! Je crois que j’aurais fait trop d’honneur à un pareil homme en faisant servir ses restes à propager les lumières de la science.

— Il peut être espion, il l’est sans doute, dit Lawton d’un air distrait ; mais il a un cœur élevé au-dessus de tout ressentiment, une âme qui ferait honneur à un brave soldat.

Sitgreaves, pendant que son compagnon faisait ce soliloque, le regardait d’un air qui semblait lui en demander l’explication, mais les yeux du capitaine étaient fixés sur un autre rocher qui s’avançant considérablement dans la vallée, semblait obstruer la route qui tournait autour de sa base.

— Ce que le cheval ne peut escalader, le pied de l’homme peut le gravir, s’écria le prudent partisan. Se jetant de nouveau à bas de son cheval, et sautant par-dessus un petit mur de pierres il commença à gravir le rocher pour arriver à un endroit d’où il aurait pu découvrir à vol d’oiseau toutes les hauteurs de la vallée et voir toutes les fentes et toutes les crevasses des montagnes. À