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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/341

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porte à croire qu’il puisse vous rendre service, et en outre qu’il ait dessein de tenir la promesse que vous dites qu’il vous a faite ?

— La nature serait coupable d’une bien grande imposture, si elle avait donné à un homme faux et trompeur les traits de l’honneur et de la franchise. D’ailleurs Dunwoodie a de puissants amis dans l’armée rebelle ; il vaut donc mieux que j’attende l’événement là où je suis, plutôt que de vous exposer à une mort certaine si vous étiez découvert.

— Capitaine Wharton, dit Birch après avoir regardé autour de lui par suite de son habitude de circonspection, et parlant avec un sérieux imposant, ni Harper, ni Dunwoodie, ni qui que ce soit au monde, ne peut vous sauver, excepté moi. Si je ne réussis à vous tirer d’ici avant une heure, demain matin vous figurerez sur l’échafaud comme si vous étiez un assassin. Oui, telles sont leurs lois. Celui qui pille et qui tue dans la guerre est honoré et récompensé, et celui qui sert son pays fidèlement et honnêtement comme espion vit méprisé, ou est pendu sans miséricorde.

— Monsieur Birch, s’écria Wharton avec indignation, vous oubliez que je n’ai jamais joué le rôle méprisable d’espion. Vous savez que cette accusation est fausse et calomnieuse.

Le sang monta au visage naturellement pâle du colporteur ; mais ses traits reprirent en un instant leur expression accoutumée.

— Ce que je vous ai dit doit suffire, répondit-il. J’ai rencontré César ce matin, et j’ai concerté avec lui le plan qui vous sauvera, s’il est exécuté comme je le désire ; sans quoi, je vous le répète, nul pouvoir sur la terre ne peut vous sauver, pas même Washington.

— Je me soumets, dit Henry cédant au ton pressant du colporteur, dont les discours lui inspiraient de nouvelles craintes sur sa situation.

Harvey lui fit signe de garder le silence, et s’avançant vers la porte, il l’ouvrit en reprenant l’air de raideur et le ton formel qu’il avait en entrant dans la chambre.

— Ami, dit-il au factionnaire, ne laissez entrer personne. Nous allons nous mettre en prière ; et nous désirons être seuls.

— Je ne crois pas quel personne désire vous interrompre, répondit le dragon avec un sourire presque moqueur ; mais si quelqu’un de la famille du prisonnier se présente, je n’ai pas le droit de l’empêcher d’entrer. J’ai ma consigne, et je dois l’exécuter, que l’Anglais aille au ciel ou non.