Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/74

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changea de couleur quand elle le vit descendre légèrement de cheval, et elle fut obligée de soulager ses jambes tremblantes en s’asseyant un moment.

Cet officier donna quelques ordres à la hâte au commandant en second, traversa rapidement la pelouse, et s’avança vers la maison. Frances se leva et sortit de l’appartement. L’officier monta les marches du péristyle, et à peine avait-il eu le temps de toucher la porte quand elle s’ouvrit pour le recevoir.

La jeunesse de Frances, à l’époque où elle avait quitté la ville, l’avait empêchée de se conformer à la coutume du jour en sacrifiant sur l’autel de la mode les beautés qu’elle tenait de la nature. Ses superbes cheveux blonds n’avaient jamais été mis à la torture ; ils conservaient encore les jolies boucles de l’enfance, et ombrageaient un visage qui brillait des charmes réunis de la santé, de la jeunesse et de l’ingénuité. Ses yeux étaient éloquents, mais ses lèvres gardaient le silence. Ses mains étaient jointes ; sa taille svelte était penchée dans l’attitude de l’attente, et l’ensemble de toute sa personne offrait une amabilité dont le charme sembla d’abord priver son amant de la parole.

Frances le conduisit en silence dans une chambre voisine de celle où toute sa famille était réunie, et, se tournant vers l’officier avec un air de franchise, elle s’écria en lui offrant la main :

— Ah ! Dunwoodie ! combien j’ai de raisons pour être charmée de votre venue ! je vous ai fait entrer ici pour vous préparer à voir dans la chambre voisine un ami que vous ne vous attendiez pas à trouver.

— Quelle qu’en puisse être la cause, répondit le jeune homme en lui serrant tendrement la main, je suis également heureux de pouvoir vous parler sans témoins. Frances, l’épreuve à laquelle vous avez soumis mon amour est trop cruelle. La guerre et l’éloignement peuvent bientôt nous séparer pour toujours.

— Il faut nous soumettre à la nécessité qui nous gouverne, répondit Frances, perdant les couleurs que lui avait données l’agitation, et prenant un air plus mélancolique. Mais ce n’est pas d’amour que je désire vous entendre parler maintenant ; j’ai à vous demander toute votre attention pour un sujet de bien plus grande importance.

— Et que peut-il y avoir de plus important pour moi que de m’assurer votre main par un nœud indissoluble ? Pourquoi me