Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 21, 1844.djvu/162

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et plus vive qu’ils ont allumée ; mais le Feu-Follet brillera encore lorsque leur feu sera éteint.

— N’y a-t-il donc pas de danger que ce brûlot ne vienne à nous ? Il en est si près que je ne suis pas sans alarmes.

— Il en est trop loin pour nous nuire, d’autant plus que nos voiles sont mouillées par la rosée. Il ne peut venir ici, tant que notre câble existera, et comme il est sous l’eau il ne peut brûler. Dans une demi-heure il n’en restera presque rien, et nous jouirons de ce feu de joie tant qu’il durera.

Et maintenant que toute crainte de danger était passée, c’était un spectacle dont on pouvait véritablement jouir. À l’aide de cette brillante lumière, on voyait la curiosité peinte sur tous les visages, qui étaient tournés vers cette masse embrasée, comme le tournesol suit la grande source de la chaleur dans sa route à travers les cieux ; tandis que les mâts, les voiles, les canons et même les plus petits objets qui étaient à bord du lougre sortaient de l’obscurité et brillaient comme s’ils eussent fait partie de cette illumination. Mais une flamme si ardente ne tarda pas à épuiser ses aliments. Les mâts de la felouque tombèrent bientôt en pyramides de feu ; le pont s’enfonça ; tous les bois succombèrent planche à planche, et la conflagration s’éteignit en grande partie dans l’eau qui en réfléchissait l’éclat. Au bout d’une heure, il ne restait guère que des cendres encore chaudes dans la cale du bâtiment.


CHAPITRE XII.


« Ils saluent un juge de paix, tant qu’il est en place, mais ils peuvent le culbuter l’année suivante ; ils respectent leur prêtre, mais n’étant pas d’accord sur le prix ou la croyance, ils le congédient sans crainte ; ils ont un talent naturel pour tout prévoir et tout savoir, et si Park revenait de son long voyage en Afrique pour leur montrer où est la source du Nil, ils lui répondraient : — Nous le savons. »
Halleck.



Raoul ne s’était mépris ni sur les moyens employés par ses ennemis, ni sur la manière dont ils les avaient obtenus. La frégate avait trouvé une des felouques chargée d’approvisionnements pour la marine, et entre autres choses de douze à quinze barils de goudron. Griffin, qui mourait d’envie de se venger de la défaite qu’il avait éprouvée le matin, pensa sur-le-champ qu’on pourrait faire de ce