Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 22, 1845.djvu/311

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enlevée, le major et M. Hardinge restèrent à causer entre eux tout en faisant honneur à la bouteille de madère qui leur avait été servie, et les jeunes gens passèrent au jardin pour respirer le frais. On s’assit sous le portique ; Rupert eut la permission de fumer un cigare, à la condition qu’il ne s’approcherait pas de quinze pas. Dès que le petit groupe fut installé, je disparus un instant, mais je ne tardai pas à revenir.

— Grace, dis-je aussitôt, je ne vous ai pas encore parlé d’un collier de perles que votre très-humble serviteur a rapporté. Je ne voulais rien dire que….

— Oh ! Lucie et moi, nous savons tout, répondit Grace avec un calme désespérant ; si nous n’avons pas demandé à le voir, c’est pour ne pas nous faire accuser de curiosité. Nous attendions le bon plaisir de Monsieur.

— Comment ! vous saviez tout ?

— Sans doute. Est-ce donc aller sur les brisées de M. Miles Clawbonny, — les deux amies m’appelaient souvent ainsi, quand elles affectaient de croire que je voulais me donner des airs, — que de savoir quelque chose !

— Mais qui a pu vous dire…

— Ah ! c’est une autre question. Peut-être pourrons-nous y répondre quand nous aurons vu le collier.

— C’est miss Merton qui nous l’a dit, Miles, dit Lucie en me regardant avec douceur ; car elle voyait que je désirais vraiment une réponse, et la chère enfant était en peine de voir qu’on prolongeait mon anxiété.

— Miss Merton ! Alors j’ai été trahi, et adieu ma surprise ! Quoique j’eusse l’air de prendre la chose en plaisanterie, j’étais piqué, et je le laissais voir malgré moi. Émilie se mordit les lèvres, mais ne dit rien. Grace se chargea de la défendre.

— C’est bien fait, Monsieur, dit-elle vivement ; vous aviez bien besoin de nous faire des surprises, et des surprises préparées de quinze mille milles encore ! Vous nous en avez déjà fait une assez grande, relativement à miss Merton !

— Comment donc ?

— Mais sans doute. Vous ne nous en dites pas un mot dans vos lettres, et nous voyons arriver tout à coup une jeune personne charmante. N’est-ce pas une surprise ? Pour celle-là, je conviens que vous ne pouviez nous en faire de plus agréable ; mais, pour des perles, fi donc !

Émilie crut enfin devoir intervenir.