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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 23, 1845.djvu/271

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évidemment au combat, et je crois qu’ils se conduiront en braves.

— Il me semble que vous autres Anglais, quand vous attaquez les Français, vous vous croyez toujours sûrs de la victoire.

— C’est un sentiment que nous cherchons à inspirer à notre équipage, mais je vous avoue que je ne le partage pas entièrement. Je suis trop vieux et j’ai trop d’expérience, Wallingford, pour ne pas savoir que tous les combats ont leurs chances et leurs vicissitudes. Sans doute il y a quelque différence dans le service, mais elle n’est pas à beaucoup près aussi grande qu’on le suppose communément. Quoi qu’il en soit, l’issue est entre les mains de Dieu. Je crois fermement que c’est pour sa cause que nous allons combattre dans cette guerre terrible ; j’ai donc la confiance qu’il ne nous abandonnera pas.

Je fus surpris d’entendre le capitaine Rowley, qui était ordinairement plein d’enjouement et de gaieté, parler ainsi ; mais il ne me convenait pas d’insister. Nous nous levâmes bientôt de table, et il donna ordre au maître d’hôtel, dès que la table fut débarrassée, de faire prévenir le premier lieutenant que les cloisons de la chambre pouvaient être enlevées. Je descendis alors avec Marbre au logement qui lui avait été préparé avec des toiles à voiles, afin de pouvoir causer librement avec lui. Au moment où nous y arrivions, le tambour appelait tout le monde à son poste.

— Eh bien ! Miles, dit Marbre en commençant, voilà, j’espère, un voyage qui enfoncera tous les autres. Nous avons été capturés deux fois, nous avons fait une fois naufrage, nous avons vu un combat, et en voici encore un qui se prépare. Que pensez-vous que le patriotisme et la vertu républicaine réclament de nous dans cette circonstance ?

C’était la première fois que j’entendais Moïse parler de républicanisme ; son caractère était tout au moins aussi opposé à la liberté que celui de Napoléon lui-même. Mais je voyais bien où il voulait en venir, et je lui répondis en conséquence.

— Je crains bien, Moïse, lui dis-je, qu’il n’y ait bien peu de républicanisme en France dans ce moment, et je ne crois pas que, pour avoir entre eux quelque ressemblance, deux gouvernements en soient meilleurs amis. Peut-être même n’en sont-ils que plus disposés à se quereller. Mais il s’agit ici d’une querelle entre la France et l’Angleterre ; nous autres Américains nous sommes en paix avec les deux