Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 23, 1845.djvu/283

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À la manière dont lord Harry Dermond reçut cette excuse, il était évident qu’il était du même avis. Il joignait au degré ordinaire l’orgueil du rang à celui de la naissance ; et il n’aimait pas qu’un homme, qui était son inférieur sous ce double rapport, s’entremît dans une affaire qui lui était toute personnelle. Il inclina froidement la tête en guise de réponse, et s’arrêta un moment, comme pour réfléchir, avant de reprendre la conversation.

— Vous devez savoir, monsieur Wallingford, dit-il enfin, qu’il est de mon devoir de prendre des informations précises sur cette affaire. Je ne fais que de sortir du port, où nous sommes restés pendant plusieurs semaines pour nous radouber ; et si un de mes officiers était revenu en Angleterre, il n’eût pas manqué de venir me faire son rapport.

— Il est très-probable en effet, Milord, qu’ils ne sont pas encore de retour. Je les ai vus, de mes propres yeux, recueillis à bord d’un bâtiment qui paraissait se diriger vers les grandes Indes.

Dans ce moment, Cléments passa à lord Harry Dermond un papier, sur lequel il avait écrit quelque chose au crayon. Le capitaine y jeta un coup d’œil, inclina la tête en signe d’assentiment, et le lieutenant quitta la chambre. Pendant qu’il était absent, mon compagnon fut assez aimable pour me donner des détails sur le combat dont j’avais été témoin, et il poussa même l’attention jusqu’à me mettre entre les mains un journal qu’il avait apporté pour le montrer au capitaine Rowley, et qui contenait le récit officiel de toute l’affaire. En y jetant les yeux, je vis que la présence de l’Aurore, dans cette occasion, y était signalée ; le nom du bâtiment était donné en toutes lettres, avec une allusion qui pouvait n’être pas très-bien comprise de la masse des lecteurs, mais qui pour moi était assez claire. Cependant Cléments ne tarda pas à rentrer ; et, sans beaucoup de cérémonie, il me dit qu’on m’attendait dans la sainte-barbe pour se mettre à table. Sur cette insinuation, je me levai ; je pris congé du capitaine ; et, en sortant, j’eus le temps d’apercevoir Marbre qui allait entrer à son tour, et Neb, debout près du charnier, qui semblait gardé par la sentinelle.

Le dîner dura près d’une heure, et lord Harry Dermond attendit poliment tout ce temps-là avant de me rappeler. Je fus surpris de trouver Marbre dans la chambre de conseil, Neb près de la porte, qui attendait, et les deux officiers, avec de l’encre, du papier et des