Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/160

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— Ne vous fiez pas à Joël Strides. Je répondrais de Mike sur ma vie, mais je serais vraiment désolée que Joël Strides sût que vous êtes au milieu de nous ; il vaudrait mieux peut-être que la plupart des ouvriers ignorassent aussi ce secret. Regardez, les deux hommes ont quitté le pied du rocher.

C’était vrai, et Robert Willoughby suivait leurs mouvements avec sa lunette. Comme on s’y attendait, ils descendirent dans le lit du ruisseau, marchant à gué le long des rives, protégés par les broussailles ; bientôt on ne les vit plus, même de la hauteur qu’occupaient Robert et Maud. Il était évident qu’ils avaient l’intention d’atteindre ainsi la forêt pour commencer la recherche de la jeune fille égarée. Peu d’instants s’écoulèrent, et Robert et Maud aperçurent les deux aventuriers quittant le courant et s’enfonçant dans la forêt. Le major et sa compagne délibérèrent. Dans les circonstances ordinaires, le plus court parti eût été peut-être de descendre et d’aller à la rencontre des messagers, quoique d’ailleurs ils dussent découvrir bientôt une des retraites habituelles de la jeune fille. Mais Maud se déclara si vivement contre cette résolution, et d’une manière si flatteuse pour le jeune homme, qu’il ne sut pas comment s’opposer à ce qu’elle désirait. Elle le supplia de ne pas se confier légèrement à Joël Strides, d’attendre qu’il n’y eût pas d’autre alternative ; car jusqu’à ce que les véritables intentions des Indiens qui occupaient la vallée fussent connues, la confidence serait prématurée. Rien n’était plus facile que se cacher jusqu’à la nuit ; alors il pourrait s’approcher de la Hutte et y être admis sans que sa présence fût connue de personne que de ceux auxquels la famille pouvait se fier. Le major insista sur l’impossibilité de quitter Maud jusqu’à ce qu’elle fût rejointe par les deux hommes envoyés à sa recherche, et alors il serait trop tard, puisqu’il aurait été vu. Quoiqu’il pût ne pas être reconnu immédiatement sous le costume qu’il portait, la présence d’un étranger exciterait les soupçons et nécessiterait une explication. À ceci Maud répondit que les endroits qu’elle fréquentait habituellement dans les bois étaient bien connus, surtout de Michel, qui travaillait souvent dans leur voisinage. C’était d’abord une petite chute d’eau située à cent verges de la rivière, et pour laquelle on avait fait un chemin ; là un cabinet de verdure, un siège et une table avaient été arrangés pour travailler, pour lire ou pour prendre des rafraîchissements. Cet endroit devait ses embellisements aux