Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/185

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— Cette circonstance peut nous être utile, Monsieur. Regardons encore les feux, et voyons si ce bruit a mis quelqu’un en mouvement près de là.

Ils regardèrent, mais ne virent rien. Pendant qu’ils étaient là sans mouvement, cachés sous un pommier, ils entendirent un bruit tout près d’eux qui leur parut devoir être causé par des pas. Tous deux s’apprêtèrent, comme des chasseurs qui s’attendent à voir les oiseaux se lever ; le bruit approchait. Enfin ils virent une forme humaine suivre lentement le sentier et s’approcher de l’arbre près duquel ils étaient, comme pour s’y mettre à couvert. Ils la laissèrent s’approcher de plus en plus. Enfin le capitaine, s’écartant tout à coup du tronc derrière lequel il s’était caché, posa la main sur l’épaule de l’étranger, et lui demanda sévèrement, mais à voix basse : Qui va là ?

Le tressaillement, l’exclamation et le tremblement de cet homme, tout dénota l’excès de sa surprise. Il lui fallut même quelque temps pour revenir de son effroi ; alors seulement il put se faire reconnaître par sa réponse.

— Miséricorde ! s’écria Joël Strides, c’est vous, capitaine ? J’ai cru voir un esprit. Qu’est-ce donc qui a pu vous porter à sortir des palissades, Monsieur ?

— Il me semble que c’est une question que je devrais plutôt vous adresser, monsieur Strides. J’avais donné l’ordre de tenir la porte fermée, et même que personne ne quittât la cour, à moins qu’on n’ait des hommes à poster ou qu’on ne soit appelé par une alarme.

— C’est vrai, Monsieur, tout à fait vrai, vrai comme l’Évangile. Mais modérons-nous un peu, capitaine, et parlons plus bas ; car le Seigneur seul connaît ceux qui sont dans notre voisinage. — Qui est avec vous, Monsieur ? N’est-ce pas le révérend M. Woods ?

— Qu’importe ? Celui qui est avec moi y est par mes ordres, tandis que vous, vous êtes ici contre ma volonté. Vous me connaissez assez, Joël, pour comprendre qu’il n’y a que la vérité qui puisse me satisfaire.

— Mon Dieu ! Monsieur, je suis un de ceux qui désirent ne jamais rien dire contre la vérité. Le capitaine m’a connu assez longtemps pour apprécier mon caractère il n’est pas besoin d’en dire davantage là-dessus.