primer combien je prenais part à la contrariété qu’il devait éprouver.
— Pourquoi aussi n’avoir pas proposé cette promenade pour samedi dernier ? lui dis-je, il faisait doux ; mais la neige tenait encore. À présent, il vous faudra remettre votre triomphe à l’hiver prochain.
— Je ne vous comprends pas ! s’écria Guert ; jamais Jack et Moïse n’ont été si pleins d’ardeur et de santé. Je parierais qu’ils vont en deux heures à Kinderhook.
— Mais qui mettra de la neige sur les routes ? Regardez ! vous verrez qu’il en reste à peine quelques traces dans les rues.
— Et que nous importent les routes et les rues ? n’avons-nous pas la rivière ? Elle reste prise plusieurs semaines encore après que la neige nous a quittés. La glace a été singulièrement unie tout cet hiver, et maintenant qu’elle n’est plus recouverte de neige, on n’a pas à craindre les crevasses.
J’avoue que l’idée de faire vingt milles sur la glace ne me souriait pas infiniment ; mais ma dignité d’homme ne me permit pas de hasarder une objection qui eût pu être attribuée à la peur.
Après le déjeuner, nous nous rendîmes en corps chez Herman Mordaunt. Quand les deux amies apprirent que nous venions réclamer l’exécution de la demi-promesse qu’elles avaient faite chez madame Schuyler, leur surprise ne fut pas moins grande que la mienne ne l’avait été une demi-heure auparavant, et leur anxiété fut sans doute beaucoup plus vive :
— À coup sûr Jack et Moïse ne sauraient déployer toutes leurs nobles qualités, lorsqu’il n’y a point de neige, dit Anneke en riant, tout Ten Eyck qu’ils sont !
— Nous autres Albaniens, nous avons l’avantage de pouvoir voyager sur la glace, quand la neige nous fait défaut, répondit Guert. Nous avons la rivière à deux pas, et c’est le moment le plus favorable pour y aller en traîneau.
— Mais non pas le moment le moins dangereux, à ce qu’il me semble. Voilà l’hiver bien complètement fini.
— Je le crois, et c’est une raison de plus pour ne pas différer, si vous voulez savoir, ainsi que miss Mary, ce dont mes petits