- Mesure pour mesure.
ous ne tardâmes pas à arriver à la partie de la forêt où les
arpenteurs avaient déjà travaillé, et, guidés par les marques
faites sur les arbres, il nous fut facile de nous diriger vers l’emplacement
de leurs opérations actuelles. Pendant une heure et
demie nous marchâmes d’un pas rapide, Susquesus en avant,
toujours silencieux, attentif, aux aguets. Pas une syllabe ne fut
prononcée pendant ce temps, quoique tous nos sens fussent sur le
qui-vive, et nous évitions avec soin tous les endroits couverts qui
auraient pu cacher une embuscade. Tout à coup l’Indien s’arrêta ;
l’instant d’après il était derrière un arbre ; prompts comme la
pensée, au même moment nous en avions fait autant, car nous
savions que, dans la guerre qui se fait au milieu des forêts, le premier
soin doit être d’avoir où se cacher, et c’était la recommandation
que nous avions reçue dans le cas où nous rencontrerions
quelque ennemi. Jusqu’alors, cependant, aucun ne se montrait ;
après avoir regardé autour de nous dans toutes les directions,
voyant que tout était tranquille et désert comme auparavant,
Guert et moi nous sortîmes de derrière nos arbres, et nous rejoignîmes
Sans-Traces au pied du pin gigantesque qu’il avait
choisi.
— Qu’est-ce donc, Susquesus ? demanda l’Albanien d’un ton sec ; car il commençait à soupçonner l’Indien de chercher à se faire valoir en exagérant ses craintes ; — il n’y a ici ni Visage Pâle ni Peau Rouge ; cessons toutes ces simagrées, et allons en avant.
— Ce n’est pas bon ; guerrier a été ici ; peut-être est il parti, peut-être non. Vous verrez bientôt ; ouvrez les yeux et regardez !