Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/38

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J’avais entendu dire qu’elle avait appelé, de tous ses vœux, le mariage de mes parents, deux grandes années avant qu’il en fût question, et qu’elle s’était toujours imaginé que c’était elle qui avait fait cette heureuse union. Le souvenir de ce succès lui donnait, sans doute, du courage pour se mettre encore une fois en campagne, et j’ai toujours supposé que c’était pour favoriser ses vues matrimoniales qu’elle nous avait ainsi réunis tous sous le même toit.

Le soir on proposa de profiter de la fraîcheur pour faire une promenade dans les environs de Satanstoe ; on n’avait que l’embarras du choix. Catherine se chargea d’être notre guide, et elle nous conduisit sur le bord de l’eau, dans un endroit où une couche épaisse de sable formait un tapis doux sous les pieds, tandis qu’une ceinture de rochers encaissait la rive. Il y avait assez d’espace pour que nous pussions, à notre choix, marcher tous de front, ou deux à deux. Miss Bayard montrant un peu de sauvagerie, et manifestant le désir de rester auprès de son amie, je renonçai à l’idée de me tenir à côté d’elle ; et restant un peu en arrière, je me mis à causer avec son frère. Je n’étais pas fâché d’avoir cette occasion de connaître la personne qui, selon toute apparence, devait entrer si prochainement dans ma famille.

Au bout de quelques minutes, la conversation tomba sur la dernière révolution, et sur les conséquences probables qu’elle devait avoir sur l’avenir du pays. Je savais qu’une partie de la famille Bayard avait pris le parti de la couronne, et que ses biens avaient été confisqués ; mais je savais aussi que d’autres membres avaient suivi une ligne de conduite toute différente, et je croyais que la branche à laquelle Tom appartenait était du nombre. Je ne tardai pas à découvrir que mon nouvel ami était un tory modéré, et qu’il aurait voulu que nous eussions pu obtenir le redressement de nos justes griefs, sans que la séparation des deux pays fût prononcée. Comme les Littlepages, père, fils et petit-fils, avaient pris les armes en même temps contre la couronne, et que cette circonstance était de notoriété publique, j’aimai la franchise avec laquelle Tom exprima son opinion sur ce point.

— Ne trouvez-vous pas, lui dis-je dans le cours de la con-