ment, à la satisfaction inexprimable de ma pauvre grand’mère, que d’être, dans cette occasion, le chevalier de miss Bayard.
— Vous pensez donc réellement à entreprendre ce voyage, major ?
— Pas maintenant ; c’est un plaisir que je tiens en réserve pour un peu plus tard. Dans ce moment, je vais à Ravensnest, qui n’est guère qu’à cinquante milles d’Albany.
— Ravensnest, Nid des Corbeaux ! Voilà un joli nom, bien que nous aimassions mieux encore, nid de rouges-gorges ou de tourterelles, n’est-ce pas Kate ? Qu’est-ce que Ravensnest, monsieur Littlepage ?
— Un domaine assez étendu, mais, jusqu’à présent, de peu de rapport, qui m’a été légué par mon grand-père Mordaunt. Mon père et le colonel ont tout auprès une propriété qu’on appelle Mooseridge. Je dois visiter les deux biens. Il est temps de s’en occuper ; car, pendant les troubles, ils ont été complètement négligés.
— On dit que les défrichements vont être poussés très-vivement pendant l’été, dit Priscilla en paraissant prendre à cette question un intérêt qui me surprit ; et qu’un grand nombre de planteurs arrivent des États de la Nouvelle-Angleterre.
— Il est rare de trouver une jeune personne qui s’occupe de ces matières, miss Bayard. On voit que je parle à une bonne whig, ce qui est synonyme de bonne patriote.
Priscilla rougit de nouveau, et parut alors vouloir se condamner au silence ; mais Catherine ne laissa pas tomber la conversation.
— Quel est donc ce singulier vieillard dont je vous ai entendu parler, Mordaunt, me demanda-t-elle, et avec qui vous êtes, depuis quelque temps, en correspondance au sujet de ces terres ?
— Vous voulez parler de mon ancien camarade le porte-chaîne ? C’est le sobriquet qu’on a donné à un capitaine de notre régiment nommé Coejemans. Maintenant, le capitaine a repris son ancien métier, et c’est à lui que je confie mes intérêts pour l’arpentage.
— Comment ! un simple porte-chaîne peut-il se charger d’une