pensa pas moins constamment à un certain Thomas de ce nom, tandis ne de mon côté je n’étais pas moins occupé de sa charmante et inexplicable sœur.
CHAPITRE VI.
Un jour ou deux après mon retour à Lilacsbush, on eût pu voir une de ces scènes de famille qui sont si communes, dans le beau mois de juin, sur les rives de notre vieux fleuve de l’Hudson. Je dis vieux, car il est aussi ancien que le Tibre, quoique le monde n’en ait parlé, ni autant, ni depuis aussi longtemps. Dans mille ans d’ici, il sera connu par toute la terre, et sa célébrité égalera celle du Danube et du Rhin. Si, sur ses bords, on ne récolte pas encore d’aussi bon vin que sur les coteaux de ce dernier fleuve, du moins le vin qu’ils produisent s’améliore-t-il de jour en jour. Tous les voyageurs de bonne foi sont d’accord sur ce point.
Sur la pelouse de Lilacsbush, non loin du bord de l’eau, s’élève un noble tilleul, planté par le père de mon aïeule maternelle, et admirablement placé pour que, dans l’après-midi, on prit plaisir à venir s’asseoir sous son ombrage. C’est là que, dans les chaleurs, nous venions manger le dessert ; c’est là que, depuis leur retour de l’armée, le général Littlepage et le colonel Dirck Follock venaient, en fumant leur pipe, repasser ensemble les divers incidents de la guerre.
Dans l’après-midi du jour en question, toute la famille était assise sous le tilleul ; chacun avait pris la place qui lui semblait