Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/24

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politique ou de droits politiques que leurs cochers ou leurs laquais, pourvu que ces derniers ne soient pas nègres tandis qu’en fait ils ont en beaucoup de choses bien moins de garanties.

— Ainsi vous pensez, Monsieur, que les perturbateurs n’ont autant d’audace que parce qu’ils disposent de beaucoup de votes ?

— Sans contredit. Leur impunité dépend de la violation de tous les principes que nous avons été accoutumés à considérer comme sacrés, et il faut toute l’influence corruptrice de la politique pour tolérer de pareilles choses. S’il y avait à chaque ferme un propriétaire comme il y a un tenancier, les plaintes de ces derniers seraient reçues avec une indifférence universelle ; et s’il y avait deux propriétaires contre un tenancier, ces plaintes seraient accueillies avec une indignation générale.

— Mais de quoi se plaignent plus spécialement les tenanciers ?

— Tu veux dire, je suppose, les tenanciers des Rensselaer ? Mais ils se plaignent de certaines clauses de leur bail, de toutes clauses en effet, car ce qui les afflige le plus, c’est de ne pas pouvoir se dire les propriétaires de terres qui appartiennent à d’autres. Ces hommes, dans leurs clameurs oublient que jusqu’à ce que leurs baux fussent obtenus, ils n’avaient aucune espèce de droits sur leurs terres, et que les droits qu’ils possèdent ils les doivent à ces mêmes baux dont ils se plaignent que les baux soient annulés, et il ne leur restera aucun droit. En supposant même que les contrats soient onéreux, de quel droit des gouverneurs et des législateurs viendraient-ils s’établir comme tiers arbitres entre les parties ? Pour moi, je récuserais de tels arbitres, parce qu’il leur manquerait la première qualité nécessaire dans un arbitrage, l’impartialité : vos gouverneurs et vos législateurs sont tous, sans exception, des hommes politiques, des hommes de parti, et il faut terriblement se méfier de pareils arbitres, lorsque des votes sont en question.

— Je m’étonne que la partie saine de la communauté ne se lève pas dans sa force pour détruire ces abus, les déraciner et en finir.

— C’est là le côté faible de notre système. Nos lois sont faites d’après la supposition qu’elles seront bien exécutées ; on s’imagine qu’il y a dans le corps de la république assez de probité et d’intelligence pour en surveiller l’application. Mais la triste réalité montre que les hommes de bien sont habituellement passifs, jusqu’à ce que les abus deviennent intolérables, tandis que l’activité