Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/27

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le jour précis où il doit payer. Il y a une grande absurdité chez ceux qui décrient ce système comme féodal et aristocratique, car ils ne voient pas que ces mêmes baux sont beaucoup plus favorables au tenancier qu’à tout autre.

— Je vous prierai de m’expliquer en quoi ; car je suis trop ignorant pour le comprendre.

— Ces baux sont perpétuels, et le tenancier ne peut pas être dépossédé. Or, plus un bail a de durée, toutes choses d’ailleurs égales, plus il offre d’avantages au tenancier. Supposons deux fermes, l’une louée pour cinq ans, l’autre a perpétuité. Lequel des deux fermiers est le plus indépendant de l’influence politique du propriétaire ? C’est assurément celui qui a le bail à perpétuité. Il est tout à fait aussi indépendant du propriétaire que le propriétaire peut l’être de lui, excepté qu’il a une rente à payer. Et, dans ce dernier cas, il est précisément dans la même situation que tout autre débiteur. Quant à la possession de la ferme, que nous supposons devoir être une chose désirable pour le tenancier, il est évident que celui qui a le bail à perpétuité est plus indépendant que l’autre, puisque ce dernier peut être évincé tous les cinq ans.

— Je commence comprendre, Monsieur, quoique la distinction entre l’esprit des institutions et leurs tendances ne me semble pas encore très-claire.

— C’est facile à expliquer. L’esprit des institutions est leur intention ; leurs tendances sont les voies qu’elles suivent sous l’impulsion des motifs humains, qui sont toujours corrompus et corrupteurs. L’esprit se rapporte aux choses telles qu’elles devraient être ; les tendances aux choses telles qu’elles sont ou telles qu’elles vont devenir. L’esprit des institutions consiste à mettre un frein aux penchants naturels de l’homme à les restreindre et à les maintenir dans des limites convenables ; tandis que les tendances suivent ces penchants, et sont souvent en opposition directe avec l’esprit. Que ces clameurs contre les tenures à bail en Amérique soient d’accord avec les tendances de nos institutions, je crains que ce ne soit trop vrai ; mais qu’elles soient d’accord avec leur esprit, je le nie formellement.

— Vous avouerez que les institutions ont leur esprit qui doit toujours être respecté, afin de maintenir l’harmonie.

— Sans contredit. La première grande nécessité d’un système