Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Oh ! un nègre et une peau-rouge tiennent vigoureusement à la vie, quand ils restent sobres. Voyons… cette expédition d’Abercrombie eut lieu il y a environ quatre-vingts ans ces gaillards-là doivent avoir dépassé la centaine, quoique Jaaf soit peut-être le plus vieux, en juger par les apparences.

— Je crois que personne ne connaît l’âge de l’un ou de l’autre voilà plusieurs années que j’entends dire qu’ils ont la centaine. Susquesus était encore étonnamment actif la dernière fois que je l’ai vu. Il avait l’air d’un homme robuste de quatre-vingts ans.

— Il est un peu cassé depuis, quoiqu’il ait, comme je vous l’ai dit, tué un chevreuil l’an dernier. Les deux vieillards se rendent assez souvent à Ravensnest, m’écrit Marthe, et l’Indien est fortement indigné des misérables mascarades qui singent les gens de sa race. J’ai même entendu dire que lui et Yop parlaient de se mettre en campagne contre eux. Sénèque Newcome est le principal objet de leur aversion.

— Que penser d’Opportunité ? demandai-je. Prend-elle aucune part à ce mouvement ?

— Une part très-prononcée. Elle est anti-rentiste en même temps qu’elle désire rester en bons termes avec son propriétaire ; c’est entreprendre de servir en même temps Dieu et Mammon. Du reste, elle n’est pas la seule parmi des milliers, qui montre une double face dans cette affaire.

— Hughes a une profonde admiration pour Opportunité, fit mon oncle et vous devez être réservé dans votre portrait. Le moderne Sénèque, je suppose ; est fortement contre nous ?

Seneky désire arrivera à la législature, et naturellement il est du côté des votants. Puis, son frère est tenancier du moulin et voudrait en conséquence devenir propriétaire. Lui-même est aussi intéressé dans les terres. Une chose m’a frappé dans toute cette controverse : c’est la naïveté avec laquelle les hommes concilient les appétits de la convoitise avec ce qu’il leur plaît d’appeler les principes de la liberté. Quand un homme a exploité une ferme pendant un certain nombre d’années, il se met à soutenir hardiment que le fait en lui-même lui donne le droit moral de la posséder pour toujours. Un moment d’examen suffit pour démontrer le paradoxe employé par ces sophistes pour calmer leur conscience. Ils exploitent leur ferme en vertu d’un bail et de ses conditions spéciales ; Assurément, tout ce qu’en pareil cas peut pro-