Nous sommes autorisés à raconter toute l’histoire, à cette exception près.
Le diacre respirait à peine tandis qu’il s’assurait de ce fait important, et ses mains tremblaient tellement, que le papier de la carte claquait pour ainsi dire entre ses doigts. Il eut recours ensuite à un expédient qui peignait tout son caractère. Il écrivit la longitude et la latitude dans un agenda qu’il portait toujours sur lui puis il se rassit et, avec la pointe d’un canif, il effaça très-soigneusement de la carte marine les indications d’îles et les chiffres qui s’y trouvaient. Cela fait, il se trouva débarrassé d’un grand poids. Ce ne fut pas tout.
Les cartes marines destinées au schooner se trouvaient sur une table dans sa propre chambre ; il traça sur l’une de ces cartes, aussi bien qu’il put y réussir, les îles des veaux marins qu’il venait d’effacer de la carte de Dagget. Là aussi il écrivit au crayon les chiffres importants qu’il nous est défendu de révéler. Il ouvrit ensuite la seconde carte : c’était celle des Indes Occidentales, et en particulier de certaines plages. L’une d’elles était indiquée de manière à ne point permettre de douter que ce ne fût celle du pirate. La même interdiction existant à l’égard de cette plage que relativement à l’île des veaux marins, nous ne pouvons en dire davantage.
Ce qu’il y avait d’écrit près de l’indication de cette plage étant au crayon, il fut aisé de l’effacer avec de la gomme élastique ; le diacre eut encore la précaution de frotter quelque objet sur l’endroit blanc que son canif avait fait sur l’autre carte, et alors il se dit qu’aucun regard ne pourrait découvrir ce qu’il avait fait. Ayant marqué cette plage sur sa propre carte des Indes Occidentales, il remit les cartes marines de Dagget dans la valise, et la referma. Il avait déjà transcrit sur le papier tous les détails qu’il tenait de la bouche même de Dagget, et maintenant il se croyait pourvu de tous les renseignements qui pouvaient le rendre l’homme le plus riche du comte de Suffolk !
Quand il se retrouva avec sa nièce, Marie fut surprise de la gaieté de son oncle si tôt après un enterrement.
C’est qu’il avait le cœur léger. Dagget, après l’avoir conduit