Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/106

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met, choisir quelques melons, et jeter un coup d’œil sur ses plantations. Avant de monter, il parcourut le jardin qu’il avait tracé dans la plaine du cratère, et il constata de nouveaux progrès dans la végétation. Partout les légumes poussaient avec une abondance merveilleuse, et la plupart étaient déjà bons à manger. Étrange disposition de l’esprit humain ! À la vue de ces produits de son industrie, de ces trésors qui de tous les côtés à la fois semblaient sortir de terre à son commandement, Marc éprouva un moment comme une sensation de regret à la pensée qu’il allait s’éloigner pour toujours. Il lui sembla même qu’il aurait un certain plaisir à revenir au Récif, et il en vint au point de se tracer un instant un tableau dans lequel il se voyait ramenant Brigitte dans ces parages pour y passer avec elle le reste de ses jours dans le repos et la tranquillité. Il est vrai d’ajouter que cette impression ne fut que passagère, et qu’elle s’effaça bientôt devant les images qui se présentèrent en foule dans son esprit, suscitées par l’approche du grand événement qui devait avoir lieu le lendemain.

En parcourant les allées de son jardin, il remarqua sur la lisière même du Cratère des traces toutes nouvelles de végétation. Il y courut et trouva une longue rangée d’arbustes, qui s’élevaient déjà de quelques pouces, et commençaient à se couvrir de feuilles. Il avait jeté là presque au hasard et sans espoir de succès, de la graine d’orangers, de citronniers, de figuiers, et autres fruits des tropiques. Pendant qu’il était occupé d’autres choses, ces semences avaient prospéré, et les divers arbustes poussaient avec cette promptitude et cette richesse de végétation qui est particulière à ces climats. Sur le Sommet, même spectacle l’attendait ; et, faut-il ajouter, peut-être aussi encore même mouvement de regret, aussi passager sans doute mais non moins réel.

Cette nuit-là Marc et Bob dormirent à bord du Rancocus. Ils se disaient que ce serait peut être la dernière fois, et leur attachement pour leur vieux navire les portait à retourner coucher à bord ; car, depuis assez longtemps, ils avaient suspendu leurs