Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/124

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cher les moyens d’établir une porte qui pût empêcher les animaux de pénétrer dans l’enceinte du Cratère. Les porcs ne s’étaient pas contentés de retourner ses plates-bandes, ils commençaient à s’attaquer aux endroits où il avait semé du gazon, et notre jardinier n’était nullement d’humeur à laisser ses prairies à leur disposition. Jusque-là le mal n’était pas grand. En remuant le sol, ils avaient mêlé encore mieux les différentes sortes d’engrais qui y avaient été successivement déposées, et c’étaient bien des coups de bêche qu’ils lui avaient peut-être épargnés ainsi ; mais leurs ravages au milieu d’une herbe si tendre ne pouvaient avoir que des conséquences funestes, et il était urgent d’y mettre un terme.

Marc prit sa porte dans la lisse de garde-corps, au pied du grand mât. Il lui fallut scier les montants ; mais ensuite il eut très-peu de chose à faire pour l’ajuster à un poteau qu’il fit entrer dans l’arche. Comme c’était le premier coup de hache ou de scie qui eût encore été donné sur la membrure du Rancocus, Marc en eut le cœur un peu serré, et il eut de la peine à s’y résoudre. C’était à ses yeux comme le commencement de la destruction de son beau navire ; mais il fallait bien sauver le reste de la récolte. Il était grand temps ; Kitty ne respectait rien et ses compagnons n’avaient guère plus d’égards. Cependant leurs dévastations mêmes ne furent pas sans profit pour lui. Les couches ainsi remuées étaient toutes prêtes à recevoir une nouvelle semence ; au lieu de les laisser en friche, Marc se décida à les cultiver de nouveau, ce qui lui donnait l’espoir de deux récoltes dans une seule année.

Ce fut de cette manière que le jeune convalescent s’occupa jusqu’à l’entier rétablissement de ses forces ; mais pendant que son corps travaillait, son esprit était loin de rester inactif. Le danger qu’il venait de courir, en appelant tristement ses pensées sur le jour où il pourrait être forcé d’abandonner la vie, sans avoir la main d’un ami pour lui fermer les yeux, lui faisait envisager sous un nouvel aspect le temps d’épreuve que nous avons à passer sur la terre, et cet avenir inconnu et terrible vers