Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/153

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vent d’une côte aussi peu hospitalière, c’était une perspective qui n’avait rien d’agréable, et Marc se décida à gouverner au nord, pendant qu’il faisait encore jour pour chercher quelque autre entrée. Il suivit pendant quatre heures cette sombre muraille dont l’aspect triste et repoussant n’était tempéré que par la blanche écume de la mer, sans apercevoir un point où même un bateau pût aborder. Comme il courait alors vent arrière, et qu’il avait largué les ris, il ne pouvait avoir fait moins de trente milles, et il put ainsi apprécier l’étendue de son nouveau territoire.

Vers cinq heures du soir, il atteignait un cap ou promontoire après lequel la côte courait tout à coup dans l’ouest. C’était donc l’angle de cette immense montagne volcanique, et Marc le nomma Cap Nord-Est. Le foc fut déployé, et la Brigitte cingla vaillamment à l’ouest pendant une heure, en serrant la côte, qui n’était plus dangereuse dès que le Cap eut été doublé.

Il était alors trop tard pour songer à gagner le Récif ; s’aventurer au milieu de ces canaux inconnus, dans l’obscurité, c’eût été une entreprise périlleuse. Il se borna donc à chercher quelque endroit où il pût jeter l’ancre jusqu’au lendemain matin ; car, même sous le vent des rochers, il n’aimait pas à rester à la merci de la pleine mer pendant son sommeil. Au moment où le soleil se couchait, et où une douce fraîcheur succédait à une chaleur dévorante, la côte s’ouvrit tout à coup, et laissa un passage assez large pour l’inviter à entrer. Il mit la barre dessous, borda les voiles, et la Brigitte y pénétra en serrant le vent. Plus elle avançait, plus le passage s’élargissait, et il finit par prendre les proportions d’une vaste baie. Un long banc de sable en dessinait le bord du côté du vent, et Marc le suivit quelque temps, jusqu’à ce que la vue d’une source l’engageât à s’arrêter. Il vira doucement pour approcher le bateau de la plage, puis, jetant le grappin, il s’élança à terre.

L’eau de la source était d’une fraîcheur délicieuse ; c’était la première qu’il goûtait, bien qu’il eût vu déjà plus de vingt sources depuis son départ. À voir cette plage, d’origine si nais-