Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/241

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au point où Waally avait rassemblé ses forces ; c’était une passe d’un quart de mille de large où la manœuvre était facile. Quoique le schooner s’avançât au combat d’un air déterminé, ce n’était pas l’intention de Marc d’en venir à une attaque. Ayant bien pris le vent, il commença à louvoyer, à courir des bordées, enfin à exécuter toutes sortes de manœuvres dilatoires, tandis que ses hommes chargeaient et tiraient les pièces aussi vite que possible. Ils faisaient, il est vrai, plus de fumée et de bruit que dé mal, comme il arrive souvent en pareille occasion ; mais la victoire leur était définitivement assurée. Les sauvages furent saisis d’une terreur panique, et l’autorité de Waally ne put les arrêter dans leur fuite. À peine furent-ils sous le vent, qu’ils firent force de rames pour échapper à des ennemis qu’ils supposaient vouloir les égorger jusqu’au dernier. Jamais combat n’eut une issue moins douteuse.

Le gouverneur était ardent dans l’action, mais il s’en fallait de beaucoup qu’il fût aussi altéré de sang que l’imaginaient les Indiens. La prudence lui disait de ne pas serrer l’ennemi avant d’être eu pleine mer. Il lui fallait pour cela deux ou trois, heures ; Marc se détermina suivre les sauvages à une certaine distance, se contentant de tirer de temps en temps une de ses pièces pour accélérer leur fuite. De cette façon, l’équipage de l’Abraham avait tout le temps de manœuvrer à son aise ; le schooner s’avançait à l’aide de ses voiles, tandis que les sauvages étaient obligés de frapper sans relâche les flots de leurs pagaies. Ils avaient aussi des voiles, mais ces voiles, tissées en fils de coco, n’imprimaient pas à leurs canots une marche assez rapide pour les éloigner de l’Abraham, qui prouvait que, s’il était facile à manœuvrer, il était en même temps fin voilier.

Waally, arrivé en pleine mer, crut la chasse terminée ; mais il se flattait d’un espoir bien trompeur. Ce ne fut qu’alors, au contraire, que la chasse commença tout de bon. Fondant sur trois des canots, Marc en aborda un, et fit l’équipage prisonnier. Parmi ces sauvages se trouvait un jeune guerrier que Bill, Brown et Wattles reconnurent pour un fils favori du chef. La