Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/261

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’Amérique, sans être absolument à l’abri de tout reproche, était probablement celle qui en avait le moins à se faire sous le rapport des acquisitions illégales. Ses conquêtes à main armée étaient peu nombreuses et n’avaient même pas de caractère bien déterminé. Et puis on verra qu’après tout l’Amérique n’aura enlevé au Mexique que les possessions qu’il ne pouvait garder ; et si cette dernière nation avait toujours observé la foi des traités, jamais elle n’aurait eu à essuyer les attaques de ses voisins.

Les sociétés qui vivent sous un système ont l’habitude de décrier tous ceux qui ne les imitent pas ; mais les hommes ne sont pas si aveugles qu’ils ne voient pas le soleil en plein midi. Une nation déclare la guerre pour un coup d’éventail reçu par son consul, et voilà toute une contrée d’origine, de religion et de mœurs différentes, qui passe sous sa domination. Une autre nation brûle des villes et massacre les habitants par milliers, parce que les gouvernants ont refusé d’admettre sur leur territoire une drogue empoisonnée, offense envers les lois du commerce qui ne peut être expiée que par une invasion terrible. Les hommes d’État de ces deux sociétés affectent cependant une grande sensibilité, lorsque, après un long sommeil, le jeune lion de l’Occident se dresse dans sa tanière, et, après vingt années de patience, allonge ses griffes pour punir des outrages qu’aucune autre nation, ayant la conscience de sa force, n’eût endurés même quelques mois ; mais c’est le jeune lion de l’Occident ! Qu’importe : tandis que la Nouvelle-Zélande et Taïti sont mis sous le joug, la Californie peut être admise à partager les droits des citoyens de l’Amérique.

Le gouverneur ne se dissimulait pas que, s’il revêtait l’existence des îles, il lui arriverait de toutes parts des demandes d’admission dans la colonie ; aussi prit-il les plus grandes peines pour cacher sa découverte. L’arrivée du Rancocus fut insérée dans les journaux sans réflexions ; on donnait seulement à entendre au lecteur que le bâtiment avait touché sur des brisants et avait perdu la presque totalité de son équipage ; que plus tard il avait