Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/289

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Warner avait installé sa famille dans un endroit planté d’arbres, où il avait construit une petite habitation. Pour le vexer, Harris venait devant la porte de la cabane, et se promenait en long et en large, en se pavanant et se rengorgeant comme les dindons ; son intention évidente était de molester Warner. Celui-ci porta plainte au gouverneur. Harris alléguait que, comme aucun tort n’avait été fait à la propriété, on ne pouvait lui demander des dommages et intérêts. Le gouverneur Woolston décida que les droits à la protection légale ne sont pas proportionnels à la valeur de la propriété ; et que, quoique Harris dans sa promenade devant la maison, n’eût détruit ni gazon, ni légumes, il avait troublé la tranquillité de Warner dans son habitation, ce qui, aux termes de la loi, est une véritable violation du droit de propriété. En conséquence Harris dut payer à Warner des dommages et intérêts. En rendant ce jugement, le gouverneur saisit l’occasion d’établir, une fois pour toutes, que dans l’application de la loi, chaque homme a droit à la protection la plus étendue, non-seulement en ce qui touche aux considérations pécuniaires, mais encore dans tout ce qui a rapport à l’honneur ou à la moralité. Cette décision, d’une justice incontestable, fut vivement approuvée. La plupart des colons n’avaient pas appris à confondre la liberté avec la licence ; ils comprenaient que la liberté n’est autre chose que la pleine jouissance, sous la protection des lois, des droits naturels, sauf les restrictions indispensables pour la conservation du gouvernement. Tous les peuples de la terre ne seraient-ils pas trois fois plus heureux, qu’ils soient constitués en république où en monarchie, s’ils comprenaient la justesse de cette définition, et s’ils la mettaient en pratique ?

Le conseil fut convoqué le lendemain de sa nomination. Après quelques préliminaires, on discuta la grande question de la division des propriétés. Warrington et Charles Woolston posèrent en principe que la Providence avait placé toutes ces terres entre les mains du gouverneur, et que lui seul pouvait transférer à d’autres des titres de propriété. Cette théorie avait quel-