Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/72

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fois avec tant d’impétuosité entre les tropiques. Ils eurent néanmoins un moment d’inquiétude qui leur fit voir de nouveau la nécessité d’amarrer le bâtiment. Le vent quitta brusquement la direction ordinaire des vents alisés, et se changea en un courant d’air qui la coupait presque à angle droit. Cela fit éviter le bâtiment, qui fut entraîné si près de la muraille de lave, qu’une ou deux fois il en laboura les parois. Marc, en sondant précédemment, s’était assuré que cette muraille surplombait, et qu’il y avait peu de risques que le bâtiment touchât le fond ; néanmoins, ce frottement même n’était pas sans danger, et pouvait, pour peu qu’il augmentât, compromettre la sûreté du navire.

Mais les vents alisés revinrent avec le beau temps, et le Rancocus reprit sa première position. Bob alors suggéra l’idée de porter à terre la plus solide de leurs ancres à jet, de l’établir au milieu des rocs, et d’y attacher de forts cordages qui viendraient s’accrocher au bâtiment, et à l’aide desquels on pourrait établir une voie de communication, qui permettrait de ne pas avoir sans cesse recours au petit canot. Marc approuva ce plan, et comme il fallait un radeau pour porter à terre l’ancre qui aurait pu faire chavirer la frêle embarcation, il fut décidé qu’on remettrait cet ouvrage au lendemain.

Le reste de la journée ne fut plus consacré qu’à des travaux peu fatigants. Marc était curieux d’observer l’effet de la pluie sur ses plantations, et la quantité d’eau qui pourrait être restée sur le Récif. Il fut donc décidé qu’on irait encore passer une heure ou deux dans l’île avant la nuit.

Avant de partir, Bob appela l’attention de Marc sur le poulailler. Il ne se composait plus que de six poules, d’un coq et de cinq canards. Les pauvres volatiles semblaient aussi souffrantes au moral qu’au physique ; elles étaient maigres et abattues ; ce qui n’était pas étonnant après un séjour de cinquante jours sur mer. Le brave garçon proposa de les lâcher en liberté dans l’île, leur laissant chercher leur nourriture comme elles le pourraient, bien qu’il se promît de ne pas les laisser tout à fait au dépourvu.