Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/107

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je vous demande pardon de vous interrompre ainsi, Mesdemoiselles, leur dit-il ; mais je présume que l’arrivée d’un vieillard ne peut jamais être tout à fait indiscrète dans le salon de ses pupilles.

Après les avoir saluées, il alla s’asseoir à l’autre bout du sofa sur lequel était sa nièce, qui s’était levée en le voyant entrer, et qui resta debout jusqu’à ce que son oncle se fût assis. Le vieillard jeta un regard satisfait sur l’ameublement du salon, et continua sur le même ton.

— Cet appartement est de nature à vous permettre d’y recevoir compagnie honorablement, et je ne vois pas la nécessité de cette réclusion constante à laquelle vous vous condamnez.

— Nous vous sommes certainement très-obligées de toutes vos attentions, mon oncle, lui dit-elle ; mais notre réclusion est-elle tout à fait volontaire ?

— Que voulez-vous dire, Mademoiselle ? N’êtes-vous pas la maîtresse de cette maison ? En choisissant pour résidence un endroit où vos ancêtres, et permettez-moi d’ajouter où les miens ont demeuré si longtemps avec crédit et honneur, j’ai moins suivi les conseils d’un orgueil assez naturel que le désir de contribuer à votre satisfaction et à votre bonheur. Il me semble que je ne vois rien ici qui doive nous faire rougir d’y recevoir nos amis ; les murailles du cloître de Sainte-Ruth ne sont pas tout à fait nues, miss Howard ; et celles qui les habitent peuvent se montrer sans trop de crainte.

— Ouvrez-en donc le portail, mon oncle, et votre nièce tâchera d’en faire les honneurs d’une manière digne de l’hospitalité de celui qui en est le maître.

— C’est parler comme doit le faire la fille d’Harry Howard, dit le vieillard en se rapprochant insensiblement de sa nièce. Si mon frère s’était dévoué aux camps, au lieu de prendre le parti de la marine, Cécile, il serait devenu un des plus braves et des plus habiles généraux de Sa Majesté. Le pauvre Harry ! il vivrait peut-être encore ! peut-être conduirait-il en triomphe les troupes victorieuses de Sa Majesté dans les colonies révoltées ! Mais il n’existe plus, Cécile, et il vous a laissée après lui pour le représenter, pour perpétuer sa famille, et posséder le peu que nous ont laissé les ravages du temps.

— Bien certainement, mon oncle, répondit Cécile en lui pre-