Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/128

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L’orateur et le marin qui étaient près de lui regardèrent le capitaine en silence, d’un air surpris, et sans faire un seul geste. Mais le troisième, qui était un peu à l’écart, soit qu’il désirât qu’on ne fit pas attention à lui, soit qu’il fût occupé à réfléchir sur sa situation, tressaillit involontairement en entendant cet ordre inattendu, et, se redressant sur-le-champ, il fit le mouvement ordonné avec la même promptitude que s’il eût été à la parade.

— Fort bien, dit Borroughcliffe ; je vois que vous êtes d’excellents écoliers, et vous apprendrez facilement. Colonel Howard, je désire garder ces trois hommes jusqu’à demain matin, et cependant je voudrais leur donner un meilleur gîte que les planches du corps-de-garde.

— Faites ce qu’il vous plaira, capitaine ; je sais que vous ne voulez que remplir vos devoirs envers le roi notre maître. On leur donnera à souper, et on les logera dans une grande chambre, dans le quartier occupé par les domestiques, du côté du sud.

— Trois chambres, colonel ; il faut qu’ils aient trois chambres séparées, dussé-je céder la mienne.

— Bien de plus facile. Plusieurs petites chambres sont vides ; il ne s’agit que d’y faire porter des couvertures, et vous pourrez placer une sentinelle si vous le jugez nécessaire, quoiqu’il me semble que ce sont d’honnêtes marins, des sujets loyaux qui n’ont d’autre envie que de servir leur roi, et dont le plus grand plaisir serait de se trouver bord à bord avec un Don ou un Monsieur.

— Ajournons cette discussion à un autre moment, dit Borroughcliffe ; je vois que miss Plowden devient pensive, et nous abusons de sa patience trop longtemps. Le café froid est, comme l’amour sous les rides, une bonne chose dépouillée de toute sa saveur. Allons, Messieurs, en avant ! puisque vous avez vu les Tuileries, vous devez savoir un peu de français. Monsieur Christophe Dillon, savez-vous ou ces trois petites chambres sont placées, situées et disposées, comme vous le diriez dans vos parchemins ?

— Oui, Monsieur, répondit le juge futur, et j’aurai beaucoup de plaisir à vous y conduire. Je pense que votre décision fait honneur à votre prudence et à votre sagacité, et je serais bien trompé si l’on ne juge pas bientôt que le château de Durham, ou quelque autre forteresse, est plutôt ce qu’il faut pour les garder.

Comme il prononça ces mots pendant que les marins sortaient