Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/131

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me retire, miss Plowden. Que ce que je viens de vous dire soit pour vous un sujet de profondes réflexions ; car je vous connais trop bien pour ne pas savoir que les erreurs politiques de votre esprit vous encouragent dans une faiblesse dont la source est dans votre cœur. Réfléchissez-y bien par intérêt pour vous-même, si vous désirez non seulement assurer votre bonheur, mais trouver du respect et de la considération dans le monde. Quant aux misérables dont vous parliez, c’est une bande de mutins, de rebelles, d’ingrats coquins ! Et si jamais un de ces damnés me tombe sous la main…

Ce furent les derniers mots de cette phrase que Catherine put entendre, car le colonel sortait en la commençant ; et, quoique la colère le fit parler assez haut, sa voix se perdit à mesure qu’il avançait dans le corridor. Elle resta un moment un doigt appuyé sur ses lèvres ; secouant alors la tête avec un sourire malin qui exprimait une satisfaction mêlée de quelque regret, elle mit le désordre, en se parlant à elle-même et sans s’en apercevoir, dans tous les préparatifs qu’elle venait de faire pour le thé et le café.

— Je l’ai amené à une épreuve peut-être un peu cruelle, se dit-elle ; mais elle a réussi. Quoique nous soyons nous-mêmes prisonnières, nous voilà du moins libres pour le reste de la nuit. Il faut absolument savoir qui sont ces marins mystérieux. Si l’œil fier d’Édouard Griffith ne brillait pas sous la perruque noire de l’un d’eux, je ne me connais pas en physionomie. Mais où M. Barnstable a-t-il donc caché son charmant visage ? il est impossible qu’il soit l’un des deux autres. Allons rejoindre Cécile.

Elle sortit en prononçant ces mots, et, parcourant légèrement les corridors, elle disparut dans un des détours qui conduisaient aux appartements plus secrets de l’abbaye.