Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/390

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esquille qui serait assez grosse pour en faire un épissoir, et ils ont fait passer le jour à travers quelques-unes de nos voiles ; mais au total, ils ne nous ont pas fait grand mal. Et le capitaine Munson ! n’ai-je pas entendu dire qu’il a attrapé une égratignure ?

— Il est mort, Monsieur, répondit Griffith d’une voix encore pleine d’horreur ; il a été emporté par dessus le bord. C’est une raison de plus pour nous occuper de nos devoirs dans ce moment de crise.

— Mort ! répéta Boltrope surpris, et enterré dans une jaquette mouillée ! Eh bien ! il est encore heureux qu’il ne nous soit rien arrivé de pire. Du diable si je ne craignais pas qu’il ne restât pas un seul bâton debout sur tout le vaisseau !

Il faisait à peine cette réflexion consolante qu’il se mit à donner les ordres nécessaires pour réparer les légères avaries que la frégate avait souffertes, et il y apporta ce sang-froid et cette tranquillité qui faisaient de lui, sinon un ami bien tendre, du moins un homme inappréciable dans sa situation.

Griffith n’avait pas encore réussi à recouvrer tout le calme qui lui était nécessaire pour s’acquitter des nouveaux devoirs dont il se trouvait chargé si soudainement et par suite d’un événement si malheureux, quand il se sentit légèrement toucher le coude par quelqu’un qui était à côté de lui.

— Le capitaine anglais paraît se contenter de cette première bordée, dit le pilote ; et comme nous sommes meilleurs voiliers, il perd trop de terrain pour la redoubler, s’il est bon marin.

— Et cependant, répondit Griffith, comme il voit que nous nous éloignons si rapidement, il doit sentir que toutes ses espérances consistent à nous désagréer. Je crains qu’il ne se remette en chasse, et qu’il ne nous lâche encore quelques bordées. Il nous faudrait un quart d’heure pour nous mettre hors de portée, quand il resterait sur ses ancres.

— Il joue un jeu plus sûr. Ne voyez-vous pas que le navire que nous avons aperçu le premier du côté de l’est a le port d’une frégate ? Il n’y a pas de doute qu’ils fassent tous deux partie de la même escadre, et que l’exprès qui leur a été envoyé ne leur ait appris que nous étions dans ces parages. L’amiral anglais avait d’abord étendu sa ligne, monsieur Griffith, et maintenant qu’il voit qu’il a réussi il la resserre.

Griffith avait été trop occupé jusqu’alors du bâtiment à trois