Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/116

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L’institution du jury, d’une utilité très-contestable, considérée sous ses meilleurs aspects, devient presque intolérable dans un pays où les institutions sont réellement populaires, à moins que la magistrature n’exerce sur l’accomplissement de ses devoirs une énergique et salutaire influence. Malheureusement cette influence, depuis cinquante ans, a diminué peu à peu parmi nous, jusqu’à ce qu’elle soit arrivée à un point où rien n’est plus commun que de trouver des juges expliquant la loi d’une manière, et le jury l’appliquant d’une autre. Dans bien des cas, il est vrai, il y a un remède à cet abus de pouvoir, mais il est ruineux, et toujours accompagné de ce retard dans l’espérance « qui rend le cœur malade. » Tout homme, même de l’intelligence la plus bornée, doit voir, à la moindre réflexion, qu’un état de choses où les fins de la justice sont annihilées, ou tellement remises qu’elles ont pour résultat l’annihilation, est un des moins désirables de tous ceux dans lesquels les hommes peuvent se trouver sous un pacte social, pour ne rien dire de ses effets corrupteurs et démoralisateurs sur l’esprit public.

Dunscomb sentait plus vivement tout cela peut-être que la plupart des hommes de sa profession ; car on s’accoutume petit à petit aux abus, au point non-seulement de les tolérer, mais d’en venir à les considérer comme des maux inséparables de l’humaine fragilité. Il était certain toutefois que, si notre digne conseiller se soumettait à la force des choses, jusqu’à fermer souvent les yeux sur les manœuvres de Timms, faiblesse dont sont coupables presque tous ceux qui sont mêlés aux hommes et aux choses, il était certain, dis-je, qu’il ne fut jamais connu pour avoir fait lui-même quelque chose d’indigne de sa haute et juste réputation au barreau.

Dunscomb avait vu sur-le-champ qu’il était nécessaire d’employer un conseil local dans le procès de Marie Monson, et Timms se recommandait à son vieux maître comme l’homme le plus capable de rendre les services particuliers dont on avait besoin. La plupart des formalités à remplir étaient purement légales, bien que nous ne devions pas cacher qu’il s’en présenta bientôt qui n’auraient pu supporter la lumière. John Wilmeter