Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/365

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— Je suis disposé à attendre, si on a une bonne raison pour insister sur le délai. Je reconnais que c’est une cause enveloppée de doute et d’incertitude, et je suis très-porté à faire tout ce que la loi sanctionnera. Cependant, je vous laisse à décider la marche que vous voulez suivre.

— À mon jugement, s’il plaît à Votre Excellence, nous devons nous adresser au pouvoir exécutif ; peut-être vaudrait-il mieux terminer la partie la plus pénible de la cause, tandis que l’accusée…

— La condamnée, monsieur Dunscomb ; c’est une triste distinction à établir, mais on ne peut maintenant s’empêcher de la faire.

— Je demande pardon à la Cour ; la condamnée…

— Oui, dit Marie Monson d’un ton solennel, je suis condamnée, et cela pour le crime révoltant, d’assassinat. Toutes mes espérances d’un glorieux acquittement sont déçues et quel que soit le résultat de cette étrange affaire, une tache restera toujours sur mon nom. Monsieur, je suis aussi innocente de ce crime qu’un enfant à la mamelle. Je puis avoir été opiniâtre, imprudente, exagérée dans mes idées et mes jugements, avoir eu cent autres défauts ; mais je n’ai jamais fait de mal ni à Pierre ni à Dorothée Goodwin. Je n’ai pas été longtemps dans la maison sans découvrir que le vieux couple vivait en mésintelligence. Ils se querellaient souvent, et cela avec aigreur. La femme était maîtresse dans la maison, impérieuse, d’une avarice sordide, tandis que, lui, il employait chaque shelling qu’il pouvait se procurer à acheter des liqueurs fortes. Son esprit se ressentait de ses excès ; c’était un idiot. C’est en cet état qu’il est venu vers moi chercher des sympathies et des conseils.

Il y avait des endroits dans ma vie passée, toute courte qu’elle est, qui me disposaient à compatir au sort d’un homme malheureux en mariage. Peu importe quelle a été mon expérience ; j’avais de la sympathie pour ce pauvre homme. Loin de vouloir lui faire du mal, je désirai lui faire du bien. Je lui conseillai de quitter la maison, de vivre séparé de sa femme, pour un temps, du moins ; il y consentit, à condition que je lui en fournirais les