— Eh bien, Stephen, je n’interviendrai plus dans votre traitement, car j’avoue que je m’entends très-peu aux maladies des chevaux. Qu’avez-vous vu dans ce journal, que vous venez de lire, à ce qu’il me paraît ?
— Eh, Monsieur, répondit Stephen en se grattant la tête, ça roule en entier sur notre affaire de là-bas.
— Notre affaire ! Oh ! vous voulez dire l’enquête et l’assassinat ; ah ça, qu’en dit le journal, hein ?
— Il dit que c’est une triste affaire et une terrible tragédie, et il s’étonne que de jeunes femmes en viennent là. Je partage assez moi-même sa manière de penser, Monsieur.
— Vous avez l’habitude d’avoir tout à fait la même opinion que le journal, Stephen, n’est-il pas vrai ? demanda Dunscomb.
— Vous l’avez dit, Esquire Dunscomb. C’est étonnant la ressemblance qu’il y a dans nos pensées. Je ne me mets jamais à lire un papier sans qu’avant d’être arrivé au milieu, je trouve qu’il pense juste comme moi. Ça me confond de savoir comment ceux qui y écrivent trouvent si bien les pensées des autres.
— Ils ont une manière de faire cela ; mais ce serait une trop longue histoire vous raconter. Ainsi ce journal a quelque chose à dire à propos de cette jeune femme, n’est-ce pas, Stephen ? et il parle de l’affaire de Biberry ?
— Beaucoup, Esquire, et ce que j’appelle même, avec bon sens. Qu’allons-nous devenir, Monsieur, si des jeunes filles de quinze ans nous frappent à la tête, en tuent deux d’un coup, et puis mettent le feu à l’étable et font de nous des momies ?
— Quinze ans ! L’article dit-il que miss Monson n’a que quinze ans ?
— Elle paraît avoir l’âge tendre de quinze ans, et elle est douée d’agréments personnels peu communs. Ce sont les propres expressions, Monsieur. Mais peut-être aimeriez-vous à le lire vous-même, Esquire.
En faisant cette remarque, Stephen offrit avec beaucoup de politesse le journal à Dunscomb ; il le prit, mais il n’était pas disposé à laisser tomber la conversation, bien qu’il jetât un coup d’œil sur l’article en continuant l’entretien. C’était son habi-