fanterie légère ayant dit à son ami qu’il ne tarderait pas à aller le rejoindre chez lui où il se promettait de se dédommager de l’abstinence forcée et des privations auxquelles il avait été condamné pendant sa longue marche. Le major prit alors le chemin de Tremont-Street, pour aller calmer les inquiétudes qu’une espérance secrète et flatteuse le portait à croire que ses belles parentes avaient conçues pour sa sûreté. À chaque coin de rue, il rencontrait des groupes d’habitants qui discutaient avec vivacité sur les événements qui venaient d’avoir lieu, quelques-uns se retirant consternés de la résolution et du courage dont avaient donné des preuves ces colons qu’ils avaient cherché à avilir aux yeux de leurs oppresseurs, mais le plus grand nombre regardant avec un air de satisfaction farouche le militaire qui passait près d’eux, et dont les vêtements un peu en désordre prouvaient qu’il était du nombre de ceux qui avaient été forcés de se retirer devant les Américains.
Lorsque Lionel frappa à la porte de la maison de Mrs Lechmère, il avait déjà oublié sa fatigue ; et, quand elle s’ouvrit, et qu’il vit Cécile dans le vestibule, exprimant dans tous les traits de son charmant visage la force de son émotion, il ne se souvint plus des dangers auxquels il avait été exposé.
— Lionel ! s’écria Cécile en joignant les mains dans un mouvement de joie ; c’est lui-même et sans être blessé ! Le sang monta de son cœur à ses joues et à son front, et, couvrant son visage des deux mains pour cacher sa rongeur, elle s’éloigna précipitamment.
Agnès Danforth ne chercha pas à cacher le plaisir avec lequel elle le revoyait, et elle ne voulut lui faire aucune question pour satisfaire la curiosité qui la dévorait, avant de s’être parfaitement assurée qu’il n’avait reçu aucune blessure. Alors elle lui dit, avec un air de triomphe, accompagné d’un sourire malin :
— Votre marche a attiré un grand concours de monde, Lionel Lincoln ; d’une fenêtre du dernier étage de cette maison, j’ai vu une partie des honneurs que les bons habitants de Massachusetts ont rendus à ceux qui venaient les visiter.
— En vérité, miss Àgnès, sans les conséquences terribles qui doivent s’ensuivre, je me réjouirais, comme vous, des événements de cette journée ; car un peuple n’est jamais certain de ses droits, jusqu’à ce qu’ils soient respectés.